Rafael Nadal a triomphé ce dimanche pour la 11e fois à Roland Garros. Dans une finale à sens unique, le numéro 1 mondial n’a laissé que des miettes à Dominic Thiem, pourtant présenté comme son principal concurrent sur ocre. A l’image de Stan Wawrinka l’an passé au même stade la compétition, Thiem n’a même pas pu prendre un petit set au Majorquin, c’est dire le gouffre qui existe aujourd’hui sur terre battue entre Nadal et le reste du monde. La question est simple: comment et quand pourra-t-il être stoppé ?
Il avait déjà marqué un immense coup après la decima l’an passé. Il était devenu le seul joueur de l’histoire à atteindre les 10 victoires dans un seul et même tournoi du Grand Chelem. Cette saison, alors que ses premiers mois ont été marqués par des blessures à répétition, Nadal a montré dès le début de la moisson terrienne qu’il serait bien encore l’homme à battre sur cette surface. Impérial à Monte-Carlo puis à Barcelone, ses deux premières undecimas, l’Espagnol avait été stoppé net par un certain Dominic Thiem en quarts de finale à Madrid. Il avait ensuite été plus que bousculé à Rome mais avait fini par s’imposer en finale.
Standards habituels
4 tournois, 3 titres. Le Majorquin était dans ses standards habituels. Une petite défaite parfois sur terre battue pour rappeler au monde qu’il n’est pas invincible, mais c’est tout. Mais que dire de son succès à Roland-Garros ? Un tournoi qu’il domine maintenant quasi-exclusivement depuis 14 ans… 2005, 2006, 2007, 2008, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2017, 2018. En 14 participations, Nadal s’est donc imposé à 11 reprises. Si le Rafa sur terre battue est bien au-dessus du commun des mortels, celui à Roland-Garros est intouchable, ou presque. Depuis son premier match Porte d’Auteuil en 2005, le Majorquin n’a connu que deux fois la défaite. En 2009 face à Soderling, et en 2015, face à Djokovic. C’est peu, très peu. L’édition 2016 est à mettre entre parenthèses puisque Nadal avait déclaré forfait avant son 3e tour pour une blessure au poignet.
Bousculer Nadal oui, de là à l’éliminer
Sur ces onze conquêtes, il a bien sûr été titillé, parfois sérieusement bousculé. Mais entre prendre un ou deux sets à Nadal sur son court Philippe Chatrier et éliminer le Roi, il y a une grosse différence, un pas que seulement deux individus ont réussi à franchir. Demandez donc à Dominic Thiem ! L’année dernière déjà, il avait infligé à Nadal sa seule défaite de la saison sur terre battue à Rome, en deux sets. Trois semaines plus tard, il a avait été corrigé sur le central en demi-finales (6-3, 6-4, 6-0). Cette année encore, il a été le seul à battre l’Espagnol sur ocre, à Madrid, là encore en deux sets. Mais une fois de plus, il a subi le même sort à Roland Garros: 3 sets secs.

Thiem, quoique disposant des armes pour battre Nadal, n’a pu que s’incliner dimanche. Crédits: Carine 06
Le livre a la même fin depuis des années, quelques soient les péripéties au milieu de l’histoire. On dit souvent que certains ont les armes pour l’arrêter. Encore faut-il savoir s’en servir, voire même que le maître des lieux vous le permette. Thiem a le jeu pour stopper Nadal, ses victoires sur terre depuis 3 ans face à lui en sont l’illustration. Mais à Roland, l’Espagnol a toujours ce petit quelque chose en plus qui le rend intouchable. Parfois c’est de la chance comme dans le premier set face à Del Potro en demi-finale qui n’a pas su saisir une seule de ses six balles de break. Parfois, c’est juste l’impressionnante maitrise du Majorquin à Paris, qui a sûrement livré contre Thiem en finale son meilleur match de la quinzaine. Le timing est quand même bon.
Seul Nadal pourra stopper Nadal
Mais alors qui peut arrêter Nadal à Roland-Garros ? Qui pourra l’empêcher d’aller chercher une 12e, 13e voire 14e couronne sur les courts de la Porte d’Auteuil. Lui-même peut-être. A 32 ans, si la carrière du Majorquin est évidemment marquée par ses 17 levées du Grand Chelem, elle l’est également par les nombreuses blessures qui handicapent l’Espagnol depuis ses débuts au plus haut niveau. Quand il est au top à Roland-Garros, il est intouchable, personne ne peut lui contester ça. Mais lorsqu’il est moins bien, il redevient « mortel » et peut s’incliner. En 2015, il avait été fantomatique contre Djokovic en quarts de finale, à une période de sa carrière où Nadal n’était que l’ombre de lui-même, errant à la 7e place mondiale à ce moment-là.
Aussi longtemps que son physique le lui permettra, Rafael Nadal sera toujours le roi à Roland-Garros. Sa moisson 2018 l’a encore montré. Même à 32 ans, il reste au-dessus de tout le monde. Avec des saisons toujours plus longues et des surfaces rapides qui, à terme, ne lui causeront probablement que des ennuis, Nadal ferait bien de s’inspirer de son éternel rival Federer. Le Suisse, en allégeant son calendrier depuis un an et demi, n’hésite pas à faire l’impasse sur la terre battue pour se donner un maximum de chances de triompher là où il est le meilleur, sur le gazon de Wimbledon notamment. C’est assurément la condition sine qua non pour que Nadal poursuive son hégémonie à Roland-Garros. S’il se calque sur la stratégie de Federer, il n’y a aucune raison de ne pas croire que Rafa puisse dominer encore sans partage à Roland Garros pendant plusieurs années.
Crédits photo à la Une: y.caradec