Traditionnelle première levée du Grand Chelem de la saison, l’Open d’Australie 2020 s’est achevée ce dimanche sur un huitième titre de Novak Djokovic Down Under. Finaliste malheureux, Dominic Thiem a quant à lui effleuré le Graal en malmenant le Djoker en finale. Un constat qui tranche avec la triste semaine des Bleus, à peine sauvée par le parcours honorable de Gaël Monfils.
Djokovic toujours aussi machiavélique
Sur la route de son huitième titre à Melbourne, le chemin n’a pas forcément été semé d’embûches extrêmes pour le numéro 2 mondial. Pourtant, il faudra se souvenir d’une finale compliquée face à un Dominic Thiem qui aura poussé le Serbe à sortir le grand jeu (6/4, 4/6, 2/6, 6/3, 6/4). Une finale au cours de laquelle Novak aura réinventé le Djoker. Ce personnage machiavélique contre lequel il est si difficile d’en ressortir indemne mentalement. Malmené, donnant même l’impression d’être à l’agonie physiquement à la perte du troisième set, Djokovic a profité d’un break rapide dans les vestiaires pour se remettre à l’endroit, instiller le doute dans le crâne d’un adversaire qui à ce moment n’avait jamais approché un titre du Grand Chelem de si près (voir par ailleurs) et redevenir ce mur infranchissable sur sa ligne de fond, impressionnant de maîtrise dans les moments clés et tout particulièrement intraitable dans un quatrième set où la pièce a longtemps vacillé avant de tomber de son côté.
Une finale qui ne va pas sans rappeler celle contre Roger Federer en juillet dernier à Wimbledon, où Nole était revenu de nulle part pour s’imposer. À 32 ans, le Serbe porte son compteur-titres en Grand Chelem à 17. Un chiffre qui lui permet d’approcher de très près Roger Federer (20 titres) et Rafael Nadal (19 titres) pour écrire son nom dans l’éternité de l’histoire du tennis. En considération du niveau de jeu du Serbe en ouverture cette nouvelle saison, il ne paraît pas impromptu d’écrire que ce compteur pourrait gonfler dans les mois à venir. Ses principaux défis de la saison resteront bien sûr de tout gagner et de pérenniser sa place de numéro 1 mondial (sa victoire à Melbourne lui permet de retrouver cette place et de ne pointer plus qu’à 34 semaines du record de Federer de 310 semaines passées au sommet, ndlr), abandonnée au profit de son rival de toujours, Rafael Nadal en fin de saison passée.
Dominic Thiem toujours plus près du Graal
À force de dire que Dominic Thiem progresse à chacune de ses apparitions en finale de Grand Chelem, peut-être arrivera-t-on dans un futur proche à écrire que l’Autrichien a enfin décroché le Graal. Battu en trois sets par Rafael Nadal en finale de Roland-Garros en 2018, le talentueux droitier de 26 ans a réussi à prendre un set à l’Espagnol en finale du dernier Roland-Garros et s’est encore plus approché du bonheur suprême en poussant Novak Djokovic au cinquième set cette fois-ci à Melbourne. L’Autrichien a déjà bien roulé sa bosse sur le circuit, s’affirme d’année en année comme un grand et le plus régulier parmi les joueurs appelés à prendre la succession des Djokovic, Nadal ou encore Federer.
Malgré tout, le temps passe vite et cette nouvelle occasion manquée lui laissera forcément de grands regrets. Qu’a-t-il manqué à l’Autrichien ? Un supplément de mental au coeur du quatrième set, ainsi que de la lucidité et de la justesse technique dans ses coups dans les moments clés. Novak Djokovic n’était peut-être pas à son meilleur niveau, malgré tout, Dominic Thiem n’a pas réussi à aller chercher une victoire qui lui tendait les bras. Néanmoins, s’il fallait voir le verre à moitié plein, nous noterons que le dur n’a jamais été la surface de prédilection de l’Autrichien malgré des progrès époustouflants ces dernières années. Son jeu fait davantage de dégâts sur terre battue, une surface où il est probablement le deuxième joueur le plus à l’aise sur le circuit après Rafael Nadal. Il ne reste plus à Thiem qu’à briser ce plafond de verre en finale de Grand Chelem, qui pour le moment freine le développement d’une carrière qui a déjà bien décollée, mais qui peine à atteindre des sphères qui refléteraient plus fidèlement son talent.
Des Bleus en berne
Il y a 12 ans, Jo-Wilfried Tsonga atteignait la finale de l’Open d’Australie, butant finalement sur un Novak Djokovic déjà stratosphérique. Qu’il semble loin ce temps où les espoirs placés dans la nouvelle génération des Mousquetaires (Tsonga, Gasquet, Simon, Monfils) nous laissaient penser que le successeur de Noah, vainqueur de Roland-Garros en 1989, ne tarderait pas à se dévoiler. Mais patatra. La décennie 2010 aura laissé énormément de regrets en Grand Chelem, que la victoire des Bleus en finale de Coupe Davis 2018 n’aura pas suffi à effacer. Dans les Majeurs, le domaine réservé des légendes de ce sport, beaucoup de Français ont réussi à se rapprocher du Graal, à humer le festin promis au vainqueur. Mais aucun n’y est parvenu. Gaël Monfils, Jo-Wilfried Tsonga, Richard Gasquet, Lucas Pouille…
Autant de « Frenchies » qui pour le moment n’ont su dépasser le statut de demi-finalistes. Cette première levée du Grand Chelem de la décennie 2020 n’aura pas participé à dissiper les doutes. Tsonga a dû abandonner dès le premier tour, Gilles Simon et Benoit Paire quitter le tournoi dès le deuxième tour, tandis que Richard Gasquet et Lucas Pouille, demi-finaliste à Melbourne en 2019, n’ont pu s’aligner pour cause de blessure. Un bien maigre bilan à peine sauvé par le rayon de soleil Gaël Monfils, seul Français à avoir passé le stade du deuxième tour… Intéressant en première semaine, la Monf’ s’est encore pris les pieds dans le tapis dans le money-time d’un tournoi Majeur contre un membre du Big Four, en l’occurence sa bête noire Dominic Thiem en huitièmes de finale. Un parcours difficile à analyser tant Monfils nous a habitué à ses habituels hauts et bas ces dernières années. Dire que le tennis français n’est pas au top est un euphémisme, pourtant la relève existe. Pour garder des raisons d’espérer notons que la finale de l’Open d’Australie Juniors a cette année opposé deux jeunes Français: Harold Mayot et Arthur Cazaux, pour une victoire du premier cité. Deux jeunes du 17 ans qui représentent l’avenir du tennis tricolore.
Crédits photo à la une: Christian Mesiano