Malgré sa victoire à Barcelone fin avril, Rafael Nadal inquiète depuis le début de la saison sur terre battue. À un peu moins de trois semaines de Roland-Garros, l’Espagnol a été battu à Monte-Carlo et Madrid. Au-delà de ces résultats, c’est surtout sa qualité de jeu qui pose question. Alors, faut-il s’inquiéter pour celui qui collectionne déjà 13 victoires Porte d’Auteuil ? Analyse.
Le débat revient quasiment chaque année de manière lancinante au moindre faux-pas de Rafael Nadal sur terre battue avant le début de Roland-Garros: l’inévitable déclin s’est-il amorcé ? Battu cette année en quarts de finale à Monte-Carlo et à Madrid, l’Espagnol n’aborde pas Roland-Garros de la meilleure des manières, alors que seul le tournoi de Rome reste à disputer avant de sauter dans le grand bain Porte d’Auteuil.
Le débat peut sûrement paraître futile, d’autant que ces dernières années il est devenu de plus en plus courant de voir le Majorquin lâcher du lest avant de croquer tout cru ses adversaires une fois les choses sérieuses venues. Les temps ont en effet changé. L’ancienne époque où Rafael Nadal écrasait la saison sur terre battue de A à Z, tel un rouleau compresseur, est révolue. Il est vrai que le joueur a vieilli (il va sur ses 35 ans début juin), que des blessures ont de plus en plus régulièrement émaillé ses saisons, et qu’une certaine forme de normalité s’est installée, le rendant moins imprévisible aux yeux de ses adversaires.
Un début de saison 2021 très particulier
Derrière les résultats en demi-teinte de Rafael Nadal, ce qui inquiète plus particulièrement est le niveau de jeu affiché. L’équation est simple: l’Espagnol semble vidé d’une partie de son mordant. Ses coups font de moins en moins mal et touchent des zones de moins en moins destructrices pour ses adversaires. Ses fans les plus assidus doivent d’ailleurs se demander ce qu’il peut bien lui arriver, alors qu’il est de moins en moins rare de le voir adopter une filière courte et de monter de manière prématurée au filet (avec une réussite très relative).
Physiquement, l’état de forme de Rafael Nadal pose aussi question. Alors que les matchs s’étirent, que la tension monte et que chaque coup de raquette devient plus éprouvant que le précédent, l’Espagnol semble davantage accuser le coup. Ce genre d’image serait particulièrement inquiétant si Nadal n’avait pas connu un début de saison 2021 tronqué. Battu en quart de finale à l’Open d’Australie en février, il n’a repris la compétition qu’à Monte-Carlo à la mi-avril. Touché au dos, l’Espagnol a donc connu un trou d’air de deux mois dont il est n’est jamais facile de revenir. Ce dernier explique d’ailleurs en partie la friabilité du taureau de Manacor en ce début de saison sur terre battue. Son corps n’est pas tout à fait remis, ne lui permet pas encore de tourner à plein régime, un constat d’autant plus visible au service, où l’Espagnol connaît des régulières baisses de régime depuis son retour à la compétition sur le Rocher monégasque.
Ne pas vendre la peau de l’ours…
Si l’état de forme de Rafael Nadal inquiète, de manière légitime lorsque l’on prend en considération son début de saison tronqué, il ne faut pour autant pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. S’il nous a toujours habitué à remporter au moins un Masters 1000 sur terre avant Roland-Garros, il faut se rappeler que Rafael Nadal avait connu un retour à la compétition peu ou prou similaire la saison passée avant Roland-Garros en septembre, après la coupure liée à la pandémie de coronavirus. Battu en quart de finale à Rome par Diego Schwartzmann, le Majorquin avait survolé les débats Porte d’Auteuil, en remportant tous ses matchs en trois sets, et en concassant de manière mémorable le numéro un mondial Novak Djokovic en finale.
Briller à Roland-Garros après une approche tronquée, Rafael Nadal sait donc faire. D’autant plus qu’il ne faut pas oublier qu’il a trouvé les ressources malgré un petit état de forme, il y a quelques semaines, pour remporter l’ATP 500 de Barcelone, au terme d’une finale dantesque face à Stefanos Tsitsipas… qui restait sur un titre à Monte-Carlo. À Rome, Rafael Nadal vient d’ailleurs d’enregistrer une victoire probante en deux sets face à l’étoile montante du tennis italien, Jannik Sinner. Il serait donc hâtif de tirer dès à présent des conclusions. Il faut d’ailleurs noter que le contexte de Roland-Garros n’a rien à voir avec les tournois de préparation qui le précèdent.
Qui pour battre Nadal au meilleur des 5 sets ?
Porte d’Auteuil, il semble exister un magnétisme entre Rafael Nadal et le court Philippe-Chatrier. Il y a déjà soulevé 13 fois la Coupe des Mousquetaires. Ses succès n’ont d’ailleurs pas tous été précédés de campagnes de préparation impériales, même si les standards que Nadal s’est imposé forcent le respect. Une autre question doit être posée: qui, aujourd’hui, sur le circuit aura la capacité de défaire l’Espagnol dans son jardin au meilleur des 5 manches ? Le format des matchs en Grand Chelem rend la tâche de ses adversaires encore plus dantesque, alors même qu’aucune tête ne semble pour le moment émerger sérieusement pour le menacer.
Djokovic, Thiem, Medvedev ? Aucun ne fait forte impression. Zverev ? Si l’Allemand a frappé fort en dominant le tournoi de Madrid, force est de constater que la marche sera haute s’il veut réaliser pareille performance à Paris. Son succès dans la capitale espagnole pourrait même avoir un effet négatif: en sortant trop vite du bois pour s’imposer comme un outsider, l’Allemand devra composer avec une attente et une pression d’autant plus fortes et d’autant plus difficiles à gérer. Une fois tous ces constats établis, une seule et unique conclusion s’impose: Rafael Nadal n’est pas dans la forme de sa vie, certes, mais ne comptez pas sur lui pour baisser pavillon si facilement dans son jardin, Porte d’Auteuil.