Parfois, quelques mots ont plus de résonance qu’un grand discours. L’étiquette « d’antichambre de la Ligue 1 » est l’une qui colle le plus souvent à la Ligue 2. Déjà raillée – certes gentiment – pour son affiliation à la célèbre marque de pizza Domino’s, la Ligue 2 souffre actuellement d’une crise de reconnaissance. Trop souvent vue comme un enfer pour les clubs moyens de Ligue 1, qui souhaitent à tout prix l’éviter, la Ligue 2 possède de nombreux atouts qu’il est pas négligeable de valoriser. Au Stade vous donne quelques raisons de mieux considérer ce championnat à rebondissement, ainsi que quelques pistes afin de l’embellir.
Un style de jeu qui favorise le spectacle
En terme d’intensité et de qualités globales de jeu, les 20 formations de Ligue 2 ont encore beaucoup de travail à accomplir pour rivaliser durablement avec leurs homologues de l’étage supérieur. Néanmoins, avec leurs moyens, ces formations savent aussi créer du spectacle, en atteste des moyennes de buts par match similaires d’une année à l’autre à celles de la Ligue 1 (2,7 actuellement). Comme quoi on voit aussi des buts dans l’univers Domino’s. D’autant plus que cette saison, de nombreuses formations ont mis un point d’honneur à créer du spectacle, à l’image du leader rémois, porté par son attaque de feu (68 buts en 35 matchs), ou de son dauphin nîmois qui peut s’appuyer sur son serial buteur, Umut Bozok (24 buts). Par ailleurs, les écarts en terme de buts inscrits sont plus fin en Ligue 2, ce qui atteste d’un penchant plutôt homogène vers l’attaque. Ainsi, la lanterne rouge tourangelle, qui réalise une saison cauchemar, a tout de même inscrit 29 buts cette saison. C’est plus que Troyes (28) et Caen (24) à l’étage du dessus.
Un plateau d’équipes relevé
À entendre la plupart des suiveurs du football, il n’y a pas photo : être en Ligue 1 promet de vivre de grosses affiches (PSG, OM, OL, ASSE…) alors que la Ligue 2, dans le sillage de Quevilly-Rouen ou de Bourg-en-Bresse, condamnerait à des vendredi soirs peu réjouissants. Néanmoins, dans une moindre mesure, il s’agit ici de lieux communs. Chaque année, à mesure que les mouvements d’ascenseurs se font, que certaines équipes supposées « Made in Ligue 1 » (Lens, Auxerre, Lorient, voire Lille l’année prochaine) descendent et que d’autres reviennent de plus bas (Strasbourg l’année dernière, peut-être Grenoble la saison prochaine), le plateau tend à se densifier et se durcir en Ligue 2. Et les belles affiches à se multiplier.
Ainsi, beaucoup de monde pouvait prétendre à monter en début de saison, entre favoris (Auxerre, Lens, Lorient) , valeurs sûres (Reims, Le Havre, Nîmes, Brest, Sochaux) et révélations (Ajaccio, Clermont, Châteauroux, Paris FC).
Un réservoir de bons joueurs et grands talents
Chaque saison, la Ligue 2 sort son lot de grands talents. Cette saison, les Siebatcheu (Reims), Bozok, Savanier, Alioui (Nîmes), Nouri (AC Ajaccio), Ajorque (Clermont) ou Tchoukounté (Paris FC) feront très probablement parler d’eux lors du prochain mercato d’été. Ce championnat conserve donc cette capacité à sortir et même à recycler de très bons joueurs. Ainsi, Marvin Martin (Reims) ou Mathieu Coutadeur (AC Ajaccio) ont pu relancer leur carrière à un très bon niveau en compagnie d’une quarantaine d’autres ex ou actuels internationaux. Ainsi, on peut découvrir que dans les dernières listes concoctées par Didier Deschamps, l’actuel sélectionneur de l’équipe de France, de nombreux joueurs ont aussi fait leur classe dans l’antichambre de l’élite, à l’image d’Olivier Giroud (avec Montpellier), de Blaise Matuidi (Troyes), de Thomas Lemar (Caen), de Ngolo Kanté (Caen), de Djibril Sidibé (Troyes) ou de Laurent Koscielny (Guingamp, Tours). Comme quoi, ce championnat sert également de tremplin, et qu’y jeter un coup d’œil peut parfois occasionner de très bonnes affaires.
Du suspense avant tout
C’est l’un des principaux atouts de ce Championnat à l’heure où les droits TV pour la période 2020-2024 s’apprêtent à être mis sur la marché. Qui ne se souvient pas de la 38e journée la saison passée, qui voyait 6 équipes se battre pour la montée et même le titre de Champion, et qui a validé la montée d’Amiens à la 96e minute ou la place de barragiste de Troyes à la 88e ? De cette montée du Havre avortée en 2016 pour un petit but seulement en faveur de Metz. Cette saison, le suspense s’annonce encore rude pour le dernier ticket synonyme de montée directe en Ligue 1 (la 2e place) entre Nîmes et Ajaccio et pour les 4e et 5e places qui donnent accès aux play-offs, et donc à un espoir, certes très aléatoire, d’accession. Imprévisible et intense, la Ligue 2 est chaque année un vecteur d’émotions sans pareil, alors que la Ligue 1 tend à s’aseptiser sous le règne du PSG.
L’avis d’Au Stade
La LFP a fait délibérément un premier pas vers une meilleure exposition de la Ligue 2 en revoyant les horaires des matchs pour la période 2020-2024. Des choix forts censés favoriser les affluences puisque 9 matchs sur 10 se joueront le samedi et que le traditionnel multiplex du vendredi soir – qui symbolisait la toute puissance de la Ligue 1 le samedi et le dimanche et la mise à l’écart de la Ligue 2 – se déroulera désormais le samedi à 19h. Les créneaux du samedi 15h et du lundi 20h45 seront conservés pour les deux meilleurs matchs. La LFP se rapproche ainsi du très fructueux modèle à l’anglaise qui accorde une place toute particulière au Championship (D2 anglaise) qui sert de mise en bouche à la Premier League et qui profite de fortes affluences et d’une très bonne audience. Néanmoins, les chantiers restent nombreux (revalorisation des droits TV, meilleurs amortissements en cas de relégation…) et cela passera également par une meilleure exposition du monde amateur (grand perdant de la nouvelle programmation TV de la Ligue 1 le dimanche) et notamment du National qui souhaiterait devenir la troisième Ligue professionnelle française.
Crédits photo à la Une: EMMANUEL LELAIDIER – HAC-FOOT.COM