Les supporters de Liverpool ne s’imaginaient sûrement pas fêter ce titre de champion de Premier League tant attendu à moitié confinés devant un Chelsea-Manchester City disputé à huis-clos. Pourtant, la défaite de Manchester City à Stamford Bridge jeudi dernier a acté l’inéluctable: après 30 ans d’attente, Liverpool retrouve enfin la lumière en remettant la main sur le titre de champion de Premier League. L’épilogue d’un lent retour au sommet accéléré par le génie d’un manager, Jürgen Klopp.
30 ans qu’une ville attendait ça. 30 ans d’occasions manquées, de présence infructueuse sur le podium de la Premier League ou de glissade destructrice dans le money-time. La bande de Jürgen Klopp a mis fin de la plus belle des manières à une attente insoutenable de la ville de Liverpool en décrochant officiellement le titre de champion d’Angleterre. Bien sûr, les supporters ne s’attendaient pas à fêter ce titre de cette manière, privés de la capacité de se rassembler. Mais sevrés de cette ivresse depuis trois décennies, les Liverpuldiens ont vu naître une vraie équipe, incarnée par des joueurs parfois sortis de l’ombre et ramenés dans la lumière par un coach allemand fou, qui en quelques années a réussi ce que de grands noms n’ont jamais pu vraiment esquisser auparavant: ramener un monument du football au sommet.
Liverpool, faire renaître la flamme
Ce titre marque avant tout l’avènement de ce qui restera sûrement comme l’une des plus belles équipes de l’histoire du club. Une formation bâtie entièrement par Jürgen Klopp, arrivé en catastrophe en octobre 2015 en remplacement de Brendan Rogers, qui incarnait tant ce Liverpool conquérant puis déclinant. Ce coach allemand, qui avait acquis le respect de l’impitoyable mur jaune de Dortmund quelques années auparavant, n’a pas mis longtemps à imposer sa marque et à bâtir une formation en béton armée, organisée autour de tauliers et magiciens dont les noms font désormais rêver l’Europe: Salah, Mané, Allison, Robertson, Alexander-Arnold…
Un retour au sommet progressif mais inéluctable
Ce titre vient donc briser de nombreuses décennies de malédiction. Une malédiction que Jürgen Klopp a un temps pu penser inséparable de son club après plusieurs échecs en finale de Ligue Europa contre Séville (2016), en finale de Ligue des champions contre le Real Madrid (2018) ou au travers d’une présence répétée sur le podium de la Premier League, derrière des équipes telles que Chelsea ou Manchester City qui continuaient de s’accaparer les lauriers.
Alors que l’épilogue de la saison passée en Premier League avait de quoi anéantir une ville – Liverpool avait terminé second derrière Manchester City malgré une saison à 97 points et une défaite seulement -, la bande de Jürgen Klopp continuait malgré tout de grandir en s’immisçant une deuxième fois de suite en finale de Ligue des champions, pour finalement s’emparer de la Coupe aux grandes oreilles aux dépens de Tottenham (2-0). Un sacre qui servira de prémices.
Tuer le suspense
Remis de ce mélange d’émotions, les pensionnaires d’Anfield n’ont laissé aucune place aux doutes cette saison, tuant froidement tout suspense en alignant les victoires les unes après les autres. Cette fois-ci, Manchester City ne pouvait tenir la cadence et le titre de champion semblait définitivement acquis pour un club qui n’attendait que le moment de l’officialisation pour définitivement exploser de joie. Une forme de retenue et de politesse à l’anglaise. 7
Mais tel un sparadrap, la malédiction est revenue hanter les esprits rouges et blanc du bord de la Mersey. Une malédiction venue de l’autre bout du monde sous la forme d’un virus. Alors qu’aucune équipe et qu’aucune circonstance sportive n’étaient en mesure de mettre à mal la marche implacable de Liverpool, la trêve imposée par le confinement a ravivé les plus folles peurs des supporters du club d’être à nouveau le chat noir du monde footballistique, alors que des scénarios tels que « arrêt du championnat » ou « décret d’une saison blanche » avaient un temps été envisagés.
À Liverpool, la fête devra attendre
Bien sûr, les plus mauvaises langues noteront que ce titre ne pourra être célébré véritablement par ce peuple liverpuldien qui l’attendait tant. Bien sûr, les modalités strictes du déconfinement outre-Manche ne permettront pas de parade ou de grand rassemblement à Anfield pour fêter ce titre à grand coup de « You’ll never walk alone ». Mais dans ces temps troublés, l’essentiel est ailleurs.
Un titre de champion ne se résume pas uniquement à de belles parades. Un titre c’est aussi les larmes sincères d’un coach, vêtu simplement du maillot de son équipe, seul, devant son écran. C’est aussi cette joie indescriptible, ancrée au plus profond de l’esprit des supporters, cette certitude que leur heure de gloire est bien arrivée et que cette équipe leur donnera d’autres occasions, dans un avenir proche, de célébrer de nouvelles conquêtes.
Crédits photo à la Une: Fars – Mehdi Bolourian