Une fois l’euphorie retombée, force est de constater que le retour de Karim Benzema chez les Bleus pose de nombreuses questions, pour le moment restées sans réponses. Tour d’horizon.
« Tellement fier de ce retour en équipe de France et de la confiance que l’on m’accorde. Merci à ma famille, mes amis, mon club, à vous… et à tous ceux qui m’ont toujours soutenu et me donnent de la force au quotidien ». C’est par ses mots que Karim Benzema accueillait, sur ses réseaux sociaux, l’officialisation de sa présence à l’Euro. D’une folle rumeur à une annonce officielle au JT de 20h, le retour de KB9 chez les Bleus aura fait l’actualité de ce mardi 18 mai 2021. Bien plus que l’interview de son coéquipier Kylian Mbappé, diffusée le même soir.
Qui aurait pu parier un retour de Benzema chez les Bleus, sous l’ère Deschamps qui plus est ? Inattendu, imprévisible ? Pas si sûr. En effet, Deschamps avait déjà surpris son monde en réintégrant un Adrien Rabiot performant avec la Juventus mais écarté en raison de son refus d’être réserviste au Mondial-2018. L’image d’un sélectionneur rancunier s’effrite donc encore un peu plus. Mais sans nul doute, il aura fallu passer par une franche explication dont les mots ne sortiront jamais. Le temps du pardon passé, la convocation de Benzema paraissait alors inéluctable au vu de sa forme actuelle et de la méforme de nombreux cadres offensifs de l’équipe. Pragmatique, le sélectionneur ? Certainement.
Un retour plébiscité et félicité
Pour le journal L’Equipe, le retour de Benzema est « l’une des plus grandes surprises de ces trente dernières années » et y voit « une manière de rappeler que l’équipe de France n’appartient à personne, que le but d’un sélectionneur est de gagner, même avec des joueurs avec lesquels il ne partirait pas en vacances à Concarneau. »
Même son de cloche en Espagne où les médias madrilènes AS et Marca louent la décision du sélectionneur tricolore: « Avec Benzema, Deschamps prend son meilleur joueur. Il n’est ni celui qui marque le plus, ni celui qui délivre le plus de passes décisives, mais il est bien, le meilleur joueur français de l’année. Karim Benzema est devenu le leader du Real Madrid au fil des saisons. »
Une convocation sportivement méritée ?
Titulaire indiscutable depuis une décennie au Real Madrid, Karim Benzema a toujours mérité sportivement d’être convoqué. Il est indiscutablement le meilleur joueur français sur cette même période, le plus régulier au haut niveau et surtout le plus titré. Depuis le départ de Cristiano Ronaldo, le Français semble avoir franchi un cap et avoir glané le leadership du groupe au point de tirer le Real à lui seul sur ces deux dernières saisons.
Et c’est peut être la raison du retour de Benzema: le pragmatisme de Deschamps. En marge de la Coupe du monde 2018 et des matchs qualificatifs pour la coupe du monde au Qatar, les Bleus ont été poussifs. L’équipe de France championne du monde est attendue au tournant et les derniers matchs furent poussifs. Mbappé a souvent été muselé, le rendant inefficient et peu prolifique. Le retour de Benzema vient ainsi apporter un second souffle au jeu offensif des Bleus.
Car Karim Benzema a tout pour bonifier le jeu tricolore. Plus mature dans son jeu, dans son sens du collectif, dans sa capacité à faire briller les partenaires qui l’entourent, sélectionner Benzema c’est amener un problème tactique en plus chez l’adversaire. Bloquer Benzema, c’est notamment laisser des espaces à Mbappé ou Coman. Une équation que Didier Deschamps n’aura sûrement pas éludé dans son analyse avant de promulguer sa liste.
Quid de l’éthique ?
Si la convocation de Benzema chez les Bleus est globalement saluée par ses coéquipiers, un point d’interrogation persiste sur la relation entre Olivier Giroud et Karim Benzema. « On ne confond pas la F1 et le karting. Et je suis gentil. Moi, je sais que je suis la F1. Il a sa carrière, il fait ce qu’il veut, met les buts qu’il veut. Il est dans son coin, je suis dans mon coin, je ne pense pas à lui », KB9 expliquait-il à l’occasion d’un échange sur les réseaux sociaux.
Nul doute que Deschamps aura consulté ses cadres avant d’acter un potentiel retour de Benzema. Et parmi eux, Olivier Giroud dont la grandeur d’âme aura vite fait de mettre son cas personnel en deçà de l’intérêt suprême de l’équipe de France. Au point d’accepter de côtoyer le banc ? Car c’est bien le risque. Les deux n’offrent pas les mêmes caractéristiques de jeu et en cela ils peuvent être deux options intéressantes d’un point de vue tactique. Et un Benzema convoqué ne peut pas être remplaçant. Il sera forcément titulaire, fort de sa complémentarité technique avec Griezmann et probablement Mbappé.
« On ne gagne pas une grande compétition qu’avec des attaquants »
C’est en ces mots que le champion du monde Bixente Lizarazu a tenu à tempérer l’euphorie populaire entourant le retour de Benzema chez les Bleus. En effet, selon lui, « il faut trouver la bonne formule, trouver les bons équilibres, trouver les bonnes combinaisons de joueurs parce que ce n’est pas en mettant sept joueurs offensifs qu’on va marquer forcément plus de buts que l’adversaire. Il faut attaquer et défendre. » Un constat d’autant plus lucide quand on sait que les Bleus de l’Euro 2000 bénéficiaient d’un moins bon équilibre que ceux champions du monde deux ans plus tôt en raison d’une armada offensive beaucoup plus fournie.
Benzema, le cadre indépassable de l’équipe de France en 2021 ?
Un second doublé, vingt ans après ? L’espoir est permis. En 2018, Mbappé avait été le nec-plus-ultra des Bleus. A chaque sacre, l’équipe de France a toujours eu un joueur phare (Platini en 1984, Zidane en 1998 et en 2000, Mbappé en 2018). Des joueurs qui, par leur simple présence, la simple évocation de leur nom, suffisent à créer un impact psychologique chez l’adversaire. Ce sera indubitablement le cas de Karim Benzema pour cet Euro.