Le nul de Tottenham lundi soir sur la pelouse de Chelsea (2-2) permet aux Foxes de réaliser l’un des plus grands exploits de l’histoire du football moderne. Leicester est champion d’Angleterre grâce à l’expérience et la fourberie de Claudio Ranieri, aux buts de Vardy et à la magie de Mahrez. Un succès inattendu mais ô combien mérité qui prouve que dans le sport tout comme dans la vie, le travail finit toujours par être récompensé.
Ce lundi 02 Mai 2016 restera à jamais comme un jour historique dans l’histoire du football Anglais, Britannique, Européen voir mondial. Leicester est champion de Premier League. Les Foxes ont réalisé l’un des plus grands exploits du football Européen. Un succès d’une équipe certes talentueuse mais qui dispose d’un potentiel économique très limité par rapport aux richissimes Manchester City, Manchester United, Chelsea, Arsenal ou encore Liverpool. Les «Foxes» (renards), comme sont surnommés les joueurs de ce modeste club du Midland Est âgé de 132 ans d’histoire (région du centre-est de l’Angleterre) resteront à jamais les premiers à avoir offert le grâle à leur club. Les joueurs de Leicester ont vu leur rêve prendre forme à la télévision, après avoir arraché dimanche à Old Trafford contre Manchester United le nul (1-1). Les camarades de Riyad Mahrez avaient besoin d’un coup de main de Chelsea face à Tottenham pour célébrer leur très attendu premier titre. Et c’est ce qui est arrivé puisque Eden Hazard et ses compagnons ont imposé le nul aux Spurs (2-2) cédant comme un symbole leur couronne à d’autres Blues qui pouvaient alors commencer à fêter leur triomphe.
Être sacré sur son canapé, c’est ainsi que le destin a voulu récompenser Claudio Ranieri, l’entraîneur Italien qui, à 64 ans est devenu le grand architecte de ce succès salué à l’unanimité par les romantiques du football. Mister Ranieri a été mis au courant du sacre mathématique des siens une fois de retour en Angleterre après avoir rendu visite en Italie à sa mère âgée de 96 ans.
Les visionnaires s’en frottent les mains
Avant ce titre historique de champion d’Angleterre, le palmarès de Leicester se résumait à trois Coupes de la Ligue remportées en 1964, 1997 et 2000 et un Charity Shield (Super coupe d’Angleterre. Ndlr) en 1971, et une place de dauphin en championnat lors de l’exercice 1928-1929. La saison écoulée, le club avait même réussi à éviter de justesse la relégation grâce à une fin de parcours exceptionnelle et Ranieri avait été par la suite engagé avec comme mission : maintenir l’équipe en Premier League. Au début du championnat, la côte des Foxes pour le titre était payé à 5000 £ pour ceux qui les voyaient décrocher l’impensable. Les visionnaires qui ont cru en cette possibilité se frottent aujourd’hui les mains grâce aux 22 buts de Jamie Vardy, à la magie de Riyad Mahrez et à la solidité de tout un groupe qui a fait mordre la poussière aux prétendus favoris.
Leicester, une ville de 330.000 habitants, a commencé à croire en son équipe après que celle-ci ait réussi à rester invaincue lors des six premières journées de la saison. La lourde défaite essuyée face à Arsenal au King Power Stadium (2-5) leur a toutefois remis les pieds sur terre mais l’équipe de Ranieri a répondu avec brio en récoltant 16 des 18 points suivants ce qui lui a permis de s’emparer lors de la treizième journée et pour la toute première fois de la saison de la tête du championnat.

Le King Power Stadium de Leicester. – Photo: Getty
Leaders sans fin depuis la 23ème journée
Le calendrier acharné des fêtes de fin d’année pouvait sonner le glas de cette formation d’autant que cette période a coïncidé avec les problèmes à l’aine de Vardy. Leicester vit alors une période de doute et accumule les contres performances, défaite sur la pelouse de Liverpool (1-0) et concède le nul à domicile contre Manchester City (0-0) et Bournemouth (0-0) et pour ne rien arranger, le club est éliminé de la FA Cup et de la Coupe de la Ligue. Un mal pour un bien finalement pour les joueurs de Ranieri qui peuvent dès lors se concentrer uniquement sur la Premier League et, après avoir repris la tête lors de la 23ème journée, ils ne la quitteront plus. Certes, il y’aura un nouveau revers contre Arsenal, à l’Emirates (2-1), ce sera du reste la dernière des trois défaites concédées par les futurs rois d’Angleterre.
La passion et l’enthousiasme des joueurs de Leicester ont été plus forts que la pression et l’incrédulité de ceux qui croyaient que Schmeichel, Simpson, Morgan, Huth, Fuchs, Mahrez, Kante, Schlupp, Drinkwater, Albrighton, Okazaki ou encore Ulloa allaient tôt ou tard finir par lâcher prise. Si beaucoup de ces joueurs ne sont mêmes pas passés par des centres de formation, ils ont pourtant réussi à écrire l’une des plus belles pages de l’histoire du football. Avec une effectif qui a coûté «seulement» 62,2 millions d’euros à son propriétaire, l’homme d’affaire Thaïlandais Vichai Srivaddhanaprabha.
Le triomphe en quelques Tweets
Leicester City. Champions of England. pic.twitter.com/WRwfysTn2N
— Leicester City (@LCFC) 2 mai 2016
CHAMPIONS !!!!! ?????? thank u everyone !!!
— Riyad Mahrez (@Mahrez22) 2 mai 2016
De Vardy à Mahrez, en passant par Drinkwater et Kanté. Sans parler de l’auteur de ce miracle sportif: Claudio Ranieri. Voici les principaux artisans de la saison triomphante des Foxes. Miracle. L’étymologie du mot latin miraculum. Il n’y a pas de meilleure façon pour définir la saison de Leicester. Claudio Ranieri est crédité d’avoir donné une identité à une équipe qui, jusqu’à il y a un an encore, se battait avec acharnement pour éviter les affres de la relégation.
Parler d’une victoire de David contre Goliath serait une analyse erronée car les géants battus par les Foxes sont nombreux: Du champion en titre Chelsea – véritable flop de cette cuvée de Premier League 2015/2016- aux deux Manchester (City & United), Arsenal ou encore Liverpool sans oublier le dernier à avoir rendu les armes: le Tottenham Hotspur de Pochettino.
Voici les notes des principaux artificiers de ce miracle: les 11 titulaires, les trois alternatives de choix. J’ai pris en compte les joueurs qui ont joué au moins 20 matchs car ce sont eux finalement qui ont écrit l’histoire.
Kasper Schmeichel – 8.5
De père en fils. De Peter à Kasper: 17 ans se sont écoulés depuis la dernière fois qu’un Schmeichel était monté sur le trône d’Angleterre. Mais remporter la Premier League avec Manchester United est une chose, le faire sous les couleurs de Leicester en est une autre. Il avait encore de toutes petites mains en 1999, le petit garçon, mais des idées très claires. « Je veux gagner le championnat comme mon papa,» disait-il à 13 ans. Depuis ce jour-là, les doigts se sont allongés, les rêves réalisés. Et grâce à ses parades, l’équipe de Ranieri est dans les livres d’histoire.
Danny Simpson – 7.5
La mobylette des Foxes. Malheur à ceux qui oublient Danny Simpson: l’Anglais aux origines Jamaïcaines. Courir, il a ça dans le sang. Evidemment, il n’est pas aussi rapide qu’Usain Bolt ou Asafa Powell, mais sur son couloir droit, il n’a rien à envier à personne. Solide défensivement, bon quand il faut apporter un plus en attaque. Il sait vraiment ce que cela signifie de remporter le titre: il l’avait déjà vécu cette expérience sous le maillot de Manchester United lors de la saison 2007/2008. Avant de défendre ensuite les couleurs de Newcastle et QPR pour enfin atterrir dans le Midland Est.
Wes Morgan – 8
Appelez-le le vétéran, le colosse. Depuis 2012, il défend avec rage la tunique bleu de Leicester, il en a vu des pas mal Wes Morgan: 182 apparitions entre Premier League et Championship (D2 Anglaise) pour le capitaine des Renards. Schmeichel mis à part, il est le joueur de champ qui détient le record de minutes jouées durant cette saison. Plus de 3.200 tours d’horloge à surveiller la zone de réparation des Renards, mais pas seulement. Le Jamaïquain a eu la satisfaction de marquer deux buts lors du sprint décisif pour le titre: un qui a offert trois points contre Southampton, un autre à Old Trafford synonyme de match nul 1-1 face à Manchester United.
Robert Huth – 8.5
Qui a dit que le mur de Berlin était tombé? Ranieri a réussi à construire l’une des charnières centrales les plus solides du championnat. Aux côté de Morgan, Robert Huth a fait valoir son expérience. Difficile d’en faire autrement pour un joueur techniquement limité mais tellement combattif. Né en Allemagne, il a grandi footballistiquement en Grande-Bretagne: cinq ans à Chelsea – où il a rencontré Sir Claudio – entre les jeunes et l’équipe première, après des passages à Middlesbrough et Stoke City. En Février 2015, il arrive en prêt des Potters pour être ensuite définitivement racheté à la fin de la saison. Sa tête victorieuse a offert la victoire à son équipe sur la pelouse de Tottenham. Sans ce but, qui sait ce qui aurait pu se passer…

Wes Morgan. – Photo: The Sun
Christian Fuchs – 7.5
Action vue et revue, mais tant que ça marche, pourquoi s’en priver ? Centre sur la gauche et Vardy qui anticipe ses adversaires au premier poteau pour donner l’avantage à Leicester. Tout le monde va célébrer le but avec le numéro 9, mais de qui est arrivée cette balle dans l’axe? Quatre-vingt dix fois sur cent, c’est grâce au gaucher Autrichien arrivé de Schalke 04 cet été. Plusieurs expériences ratées entre l’Autriche et l’Allemagne, avant de trouver la gloire outre manche. L’un des paris les plus réussis de Mister Ranieri.
Jeffrey Schlupp – 7
Lui, le maillot de Leicester, il l’a toujours porté. Bien que son histoire soit tout à fait particulière: né à Hambourg, de nationalité Ghanéenne, il a grandi en Angleterre. Jeff, après une saison en prêt à Brentford, est retourné à la base. Plus de 100 apparitions avec les Renards, il répondu toujours présent lors des 23 occasions où il a été appelé à faire le job.
Riyad Mahrez – 10
Difficile d’expliquer avec les mots la saison de Mahrez. Le faire en se basant sur les statistiques serait réductif, trompeur et inapproprié. Mais quelque part, il faut bien commencer par là: Son triplé, le premier d’un joueur Algérien en Premier League face à Swansea donne la dimension de ce qu’est capable de faire le gaucher de Sarcelles. Ses dribbles? No way comme disent les Anglais. Il est imprenable pour 90% des défenses britanniques. Et quand il ne marque pas, il offre des caviars à ses coéquipiers: 10 passes décisives qui s’ajoutent à ses 17 réalisations. Champion de Premier League, il remporte également le prix du meilleur joueur de la saison. Il est le premier joueur Africain à le faire.
N’golo Kanté – 9
Dernier arrivé, un des plus jeunes joueurs de l’effectif. Il faut lui donner le temps de s’intégrer, d’autant il y a quelques mois encore, il jouait en France. Son transfert a coûté € 9.000.000, le deuxième le plus cher de Leicester du dernier mercato estival. Et pourtant, dès les premiers matchs avec la tunique bleue, on se rend rapidement compte que ce p’tit gars n’a rien à apprendre. Il court plus que tous les autres, récupère les ballons comme un chien enragé, relance la manœuvre avec la précision d’un chirurgien. Sa convocation et ses débuts en équipe de France sont la juste récompense de sa fabuleuse saison. Comparé à Makélélé, Kanté se dit être inspiré par Lassana Diarra. Le gars est en plus modeste.
Andy King – 7
Il est l’un des 26 joueurs à avoir joué au moins 300 matchs dans l’histoire de Leicester. Une véritable légende. Huit saisons avec les Foxes dans trois divisions différentes: de la League One (D3 Anglaise) à la Premier League, en passant par quelques saisons en Championship (D2 Anglaise). Le numéro 10 sur le dos, la promesse du football Gallois n’a jamais véritablement percé. Cette année, il a eu la satisfaction de marquer un but contre West Bromwich: si les Foxes ont un point de plus, ils le lui doivent.
Danny Drinkwater – 8.5
Pour certains joueurs, cela ne sert à rien de courir tout au long d’une partie pour être décisif. Parce que le cerveau est parfois plus rapide que les jambes. Ayant grandi dans les équipes de jeunes de Manchester United, il a été prêté à plusieurs clubs. Puis, en 2012, Leicester décide de croire en son potentiel: besoin d’un expert en milieu de terrain. Un choix judicieux. Grâce au travail de sape de Kanté, Drinkwater a été en mesure de démontrer à l’ensemble de l’Angleterre son habilité dans la construction du jeu. Le 29 Mars, il fait ses débuts avec l’équipe nationale face aux Pays-Bas. Il est loin le temps où son nom était utilisé pour faire des jeux de mots.

Marc Albrighton. – Photo: Sky Sports
Marc Albrighton – 8
From zero to hero. Il y a beaucoup d’histoires de revanches personnelles dans cette formation de Leicester. L’une d’elles concerne le garçon né à Tamworth et qui a fait toutes ses classes dans les équipes de jeunes d’Aston Villa, il a réussi à se tailler (pour une période) une place de titulaire en équipe première mais beaucoup n’étaient pas satisfaits au sein du club du rendement du jeune Marc. Un joueur moyen, rien de plus qui était même prêt à évoluer en division inferieure du côté de Wigan pour avoir du temps de jeu, avant de revenir à Birmingham. Mais comme les meilleurs contes de fées, la chance frappe à sa porte à l’été 2014 et elle a l’apparence d’un renard. Albrighton, cette saison est du reste le seul qui a joué tous les matchs de Leicester: 39 y compris ceux de la FA Cup et la Coupe de la Ligue « Félicitations Mr. All-Brighton. »
Shinji Okazaki – 8
Il est le joueur le plus cher dans l’histoire de Leicester, il a coûté au club un peu plus de 10 millions. Seulement? Oui, pas d’erreurs de casting pour Srivaddhanaprabha, président Thaïlandais des champions d’Angleterre. Juste 55 millions dépensés pour construire l’effectif qui a renversé les plus grosses cylindrées du royaume uni. Okazaki s’est avéré être le partenaire idéal de Jamie Vardy: pression sur la défense adverse, espaces créés grâce à ses mouvements perpétuels et parfois même auteur de buts décisifs. Le dernier en date contre Newcastle qui avait permis à l’équipe de Ranieri d’empocher les trois points. Bien que sa meilleure prestation fut celle du Goodison Park: un but et une passe décisif pour le Japonais le plus prolifique de l’histoire de son pays.
Leonardo Ulloa – 7.5
Donnez-lui une médaille. Il l’a mérite, le douzième joueur indiscutable de cette formation. Parce que tout de suite après le XI type, on retrouve Leo. L’Argentin qui possède également un passeport Espagnol. Il a joué dans la péninsule ibérique pendant cinq ans avant de déménager en Angleterre. Jouer en Premier League, son rêve depuis l’enfance. Il le réalise grâce à Leicester City. Cette saison, il a joué 32 matchs – pas mal pour un réserviste. Titulaire à seulement six occasions. Son bilan est de six buts et trois passes en à peine mille minutes jouées: un but toutes les 156 minutes, une moyenne similaire à celle de Vardy qu’il a dû remplacer lors des deux dernières sorties des Renards. Contre Swansea, son doublé a soulagé Ranieri. C’est ce qu’on appelle un super sub …
Jamie Vardy – 9.5
Trop petit, trop vieux. Dîtes ce que vous voulez, mais il est le héros du conte de fée de Leicester. Dans les rues de la ville, les maillots avec le numéro 9 sont plus nombreux que les pubs, mais Jamie a fait beaucoup plus. Tout le monde connaît maintenant son histoire. De simple travailleur à champion d’Angleterre au nez et à la barbe de ceux qui n’ont pas cru en lui lorsqu’il était encore gamin. Sa grinta et ses buts, tous décisifs ont alimenté le rêve des siens. Sans lui, les Renards seraient huitièmes de la Premier League: les réalisations de l’avant-centre de Sheffield ont fait gagner pas moins de 21 points. Ranieri lui doit beaucoup. Son expulsion contre West Ham a été sans conséquences. Maintenant, (le) Cendrillon a gagné et le mérite revient à son prince. Sa talonnade victorieuse en sélection contre l’Allemagne championne du monde en match amical en mars dernier est juste une anecdote à raconter à vos amis après la rencontre, toujours avec une bière à la main comme ce bon Jamie.
L’Entraîneur : Claudio Ranieri 10+
Le meilleur pour la fin, Mister Claudio Claudio. En Août, il s’assoit en Aout dernier sur le banc d’une équipe qui s’est quelques mois auparavant maintenue de justesse. L’objectif: rester en Premier League. Mais l’appétit – vous le savez – vient en mangeant, en particulier pour ceux qui ont jeûné pendant trop longtemps. Après avoir frôlé sur le banc de la Roma un Scudetto inattendu mais qui aurait été tellement mérité. Le doublé de Giampaolo Pazzini qu’il l’en a privé est aujourd’hui qu’un mauvais souvenir. Les cauchemars ont cédé la place aux rêves. Pardon, à la réalité. Une vengeance contre ceux qui, à l’époque où il dirigeait Chelsea l’avaient surnommé «The Tinkerman », pour ses indécisions sur la formation à mettre en place. Alors, vous savez quoi? Ce seront toujours les mêmes 11 (ou presque) qui vont jouer cette saison. Leicester survole le classement et personne n’est capable de suivre le rythme. Son 4-4-2, très Italien, lui permet de battre tous les gros de Premier League (à l’exception des Gunners). Il avait quitté le football Anglais en terminant derrière Arsenal confirmant l’étiquette qui lui collait à la peau, celle de l’éternel second pendant 12 ans dans toutes ses expériences en tant que manager. Mais Sir Claudio ‘’le têtu’’ n’a jamais abandonné. Maintenant, il pourrait regarder fièrement tout son monde de haut en bas. Mais ce n’est pas le style de la maison. Isn’t it ?
Well done Leicester !
Big congrats to @LCFC proud of you guys and Mister Claudio Ranieri. The dreams sometimes come true. #ComeOnFoxespic.twitter.com/gAswhYgXLD
— † Paolo Hamidouche’ (@Paolino_84) 2 mai 2016
Photo à la une: La Croix