Alors que l’UEFA vient d’entériner aujourd’hui son projet de réforme de la Ligue des champions, 12 des plus grands clubs européens ont crée un véritable choc en annonçant snober cette réforme et mettre sur pied leur propre Super Ligue. Ce projet pourrait saper tout ce qui fait la beauté du foot européen. Édito.
Ils s’appellent Real Madrid, FC Barcelone, Atletico Madrid, Juventus Turin, AC Milan, Inter Milan, Liverpool, Manchester United, Manchester City, Chelsea, Tottenham et Arsenal. Ils ont tous en commun d’être des nantis, d’être les clubs les plus riches du globe, et de vouloir faire sécession du commun des mortels du football européen.
Un affront pour l’image populaire des clubs impliqués
Il ne faut pas s’y tromper, le projet de Super Ligue annoncé par ces 12 clubs pourrait créer un schisme irréversible sur le Vieux-Contient, créer deux mondes du ballon rond à deux vitesses, et saper les fondements de tout ce qui fait la beauté de ce sport. D’ailleurs, ce projet a suscité un large tollé au sein du monde du football, des clubs huppés ayant refusé d’y prendre part (les clubs français et allemands) jusqu’aux journalistes, en passant par le monde politique. Ainsi, un représentant de la Commission européenne a parlé d’un projet « contraire aux valeurs de l’Union européenne« et Emmanuel Macron s’est félicité qu’aucun club français n’y prenne part.
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Car ce projet est véritablement un affront pour tous les clubs impliqués. Ce dernier ne repose que sur une logique purement financière – les clubs concernés étant moyennement satisfaits de la réforme proposée par l’UEFA en termes de retombées économiques supplémentaires. Mais également sur le cynisme des présidents de ces clubs, Florentino Pérez (Real Madrid) en tête, qui tournent aujourd’hui le dos à une compétition qui a forgé leur légende.
Un projet qui pourrait consacrer 15 nouveaux rentiers du football européen
Concrètement, le projet de Super Ligue s’articulerait autour de 20 équipes. 15 disposeraient d’un ticket permanent, et seulement 5 seraient en mesure chaque année, de par leur performances sportives, de venir tremper leurs lèvres dans le même calice que les nouveaux rentiers du football européen. Car il s’agit bien de cela. Le fric, le fric, le fric. Et surtout le fric facile et sans effort.
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Si la plupart des 12 clubs concernés brillent chaque année en C1 et tutoient régulièrement les sommets dans cette compétition, bien que leur volonté de faire sécession soit déplorable, que penser d’un club comme Arsenal, qui n’a jamais su se réinventer sportivement, et qui pourrait ainsi s’assurer une rente aussi bien financière que sportive en étant un invité permanent à la table des plus grands d’Europe, ce que les Gunners ne parviennent plus à faire par la seule voie qui forge les grands destins, leurs performances sportives.
Ce projet est dangereux pour l’avenir du football européen. S’il aboutit, il finira inexorablement par assécher les championnats nationaux, les clubs y ayant un siège permanent pouvant chaque année matcher avec les plus grands sur la scène européenne sans avoir à faire le boulot sur la scène nationale. Les championnats nationaux perdraient ainsi en intensité, en compétitivité et les retombées sportives et financières en cascade seraient in fine dramatiques pour les plus petits clubs, de la première division comme des divisions inférieures.
La Super Ligue, un « hold-up » que l’UEFA doit empêcher
Car ce projet est également un « hold-up » que l’UEFA ne peut laisser advenir. La Super Ligue qui pourrait ainsi voir le jour vampiriserait à la fois l’ensemble des meilleurs joueurs, qui voudraient y évoluer, mais aussi l’ensemble des sponsors les plus lucratifs, qui voudraient s’y afficher. Encore une fois, si les clubs évoluant dans ce cercle fermé en profiteraient grassement, les clubs moyens et plus petits finiraient forcément par devoir se contenter des miettes.
🔴 Hans-Joachim Watzke, directeur général du Borussia Dortmund, annonce que le BVB et le Bayern Munich, à l9;instar des autres membres de l’Association européenne des clubs, rejettent le projet d’une Super Ligue.
(communiqué) pic.twitter.com/RHhVa37s99
— Actu Foot (@ActuFoot_) April 19, 2021
Cette évolution n’est pas souhaitable pour le football européen. Il est primordial que l’UEFA sorte l’arme nucléaire pour que ce projet de schisme et de sécession des nantis ne voit jamais le jour: le président de l’UEFA, Aleksander Čeferin, a laissé entendre qu’il pourrait expulser tous les clubs qui participeraient à cette Super Ligue de leurs championnats nationaux, et empêcher les joueurs qui y prendraient part de la possibilité de participer à des compétitions internationales sous les couleurs de leur sélection nationale. La FIFA lui a apporté son soutien dans la foulée.
L’UEFA ne doit pas revoir sa copie
La plus haute instance du football européen, qui vient d’entériner son projet de réforme de la Ligue des champions n’aura d’ailleurs pas à revoir sa copie. Il est normal que la plus prestigieuse compétition mondiale reste compétitive et donc ouverte aux clubs qui le méritent. Les plus grands clubs, dont certains parmi la liste ont connu ou connaissent un déclin relatif depuis quelques années, ne devraient pas avoir peur d’être bousculés et de devoir perpétuellement se réinventer pour remporter des trophées. Le sport est une compétition permanente qui ne doit pas se transformer en show fermé et réservé à des privilégiés qui n’ont plus envie de se mouiller.
Le PSG a dit non, mais pour combien de temps ?
Il est appréciable que le Paris Saint-Germain, un temps associé au projet, ait finalement décidé de s’en détacher. Le club de la capitale est justement en train de se bâtir une nouvelle stature européenne en renversant certaines mastodontes au prix d’efforts sportifs importants, quoique boostés par les pétrodollars qataris. Il n’en reste pas moins que si ce projet voit le jour, le club de la capitale n’aura d’autre choix rationnel à faire que de la rejoindre. Les retombées seraient telles que si le PSG veut rester compétitif, et veut continuer à attirer des grands joueurs, du public et des sponsors juteux, il n’aurait d’autre choix que de mettre un genoux à terre. Cela serait regrettable.