Sur la touche depuis un an et son licenciement de Manchester United, José Mourinho vient de retrouver un club à Tottenham où l’ère Mauricio Pochettino se termine. Alors que le technicien Portugais avait déjà été approché par le président Lévy en 2007, l’aventure va finalement avoir lieu. Cet énième rebondissement dans la carrière du Special One illustre bien tous ses paradoxes.
Un retour très bien préparé
«Je ne pourrais jamais entraîner Tottenham». A peine arrivé chez les Spurs, José Mourinho a logiquement été interrogé sur cette petite phrase qu’il avait lancé il y a 4 ans lorsqu’il était entraîneur de Chelsea. Le Mou’ a fait du classique en répondant «c’était avant que je me fasse virer», provoquant les rires des journalistes : les vieilles recettes marchent toujours. Au delà de cette petite phrase qui ne veut rien dire, Mourinho affiche aujourd’hui un nouveau visage. Durant son année au chômage forcé, il a travaillé son image notamment à la télé où il s’est montré beaucoup plus calme, posé et réfléchi. Un travail de communication extrêmement brillant qui a fini par payer puisqu’il a retrouvé un club du top européen, un club finaliste de la dernière Ligue des Champions même.
On en oublierait presque son bilan à Manchester ou son manque de remise en question. En un an, médiatiquement, on est passé d’un entraîneur terminé et logiquement licencié, à l’homme providentiel qui a beaucoup appris de son passage à vide. Côté sportif, Mourinho aussi avait un plan, il savait très bien ce qu’il voulait : un des 6 grands clubs de Premier League. Pourtant, il n’a jamais rien dit, s’ouvrant alors toutes les portes et travaillant au corps le président de Tottenham qui se trouvait dans une situation délicate avec Pochettino. Ainsi, on a vu Mourinho dans les tribunes de Lille vanter le niveau de la Ligue 1, puis il a laissé les bruits courir sur la folle envie des socios de le voir revenir au Real, avant de se laisser courtiser par Jean-Michel Aulas. Mais la vérité c’est que depuis longtemps, José voulait Tottenham. JMA lui même indiquait au moment de prendre Rudi Garcia que le Special One avait un autre club dans sa ligne de mire. C’était les Spurs. Pas un hasard s’il ne s’est même pas passé 12h entre le départ de Pochettino et l’arrivée du Mou. Cet énième rebond se rajoute à la longue liste des choses qu’il n’a pas fait comme les autres dans sa carrière.
Le Roi des paradoxes, une carrière unique
José Mourinho est un homme de contraste et de caractère. Il n’y a qu’à voir son parcours pour s’en rendre compte, partout où il est passé il y a eu des événements mourinhesques. Les trois premières saisons de sa carrière donnaient le ton : engagé par Benfica il est viré au bout de 9 matchs, se relance à Leiria et finit par être pris par… Porto. Déjà deux extrêmes et un fracas. À Porto il va connaître un fort succès, deux titres en deux saisons complètes et une victoire en Ligue des Champions, la légende du Mou est née. Celle du Special One va naître très vite elle aussi car il est courtisé par la Premier League. Très intéressé par Liverpool, il déclare ne pas vouloir rejoindre Chelsea qui est selon lui un «projet incertain» avec beaucoup d’argent où l’implication de l’investisseur Abramovitch est douteuse. Au début de la saison suivante, il est sur le banc de Chelsea où Abramovitch a fait de lui l’entraîneur le mieux payé au monde. Avec deux Premier League conquises en trois saisons et beaucoup d’autres trophées, son passage chez les Blues est une réussite même s’il échoue en C1. Et alors que sa quatrième saison à Stamford Bridge commence, il se brouille avec le président et s’en va. Il vit alors une première année sabbatique dans sa carrière avant d’aller conquérir un splendide triplé avec l’Inter Milan dont une nouvelle C1. Mais là aussi la fin sera spéciale : il s’en va juste après ce triomphe à la suite d’un accord entre Milan et Madrid. Mourinhesque. Celui qui a fait sa formation d’entraîneur au Barça va combattre son collègue Pep Guardiola et la Pep Team pour écrire une des plus belles pages de l’Histoire des Clasico. Cependant, il ne gagnera qu’un titre et une coupe en trois ans dans la capitale espagnole et perdra la majorité des duels face au rival catalan (avec de belles défaites). Et à la fin il ne se fait pas virer mais perd son vestiaire, notamment Casillas et Ramos, et ne sera pas reconduit.
Mourinho retourne alors à Chelsea. Tient ! Il n’avait pas encore fait le coup du come-back. Ce second passage sera rempli de contrastes puisqu’il va à nouveau faire gagner une Premier League aux Blues et se faire virer 6 mois plus tard. Que manque t-il à son tableau de chasse? La trahison. C’est ainsi qu’il se saisit de l’opportunité créée par le départ de Louis Van Gaal pour devenir l’entraîneur de Manchester United. Nouveau duel avec Pep, nouveaux trophées (Coupe de la Ligue et Europa League), nouvelles critiques sur son personnage et son jeu, puis nouveau licenciement. S’en suit alors l’année blanche que l’on vient de vivre où il jouera au chroniqueur sur SkySports, se réconcilia avec Wenger, pris de la distance etc… Aujourd’hui une nouvelle page s’ouvre et on se demande bien de quoi elle sera faite. A t-il réellement changé? Peut-il se montrer au niveau? Fera t-il gagner un titre aux Spurs? L’histoire sera terminera t-elle mal?
Avoir entraîné le Real de Cristiano face au Barça de Pep, être passé par trois des six grands clubs anglais dont deux fois par Chelsea, s’être fait virer quatre fois, avoir vécu deux années au chômage forcé, avoir multiplié les frasques… tout en gagnant des (gros) trophées et en retrouvant toujours un (grand) club : voilà pourquoi Mourinho est unique. Voilà pourquoi aujourd’hui il n’est presque pas étonnant de le voir dans un nouveau rôle, comme un acteur, celui de l’entraîneur repenti qui veut prouver qu’il va relever un nouveau défi. Maintenant, c’est le terrain qui doit parler José.
Crédits Photo à la Une: Dudek1337