C’est une annonce qui en a sans doute surpris plus d’un. Le 2 novembre dernier, Mediapart a publié des informations confidentielles quant au monde du football. D’après le média français, certains clubs envisagent de créer une nouvelle compétition. C’est la Super Ligue Européenne. Au Stade s’est intéressé de près à cette affaire.
Football Leaks 2. Ce nom semble provenir d’un titre de film. En réalité, il n’en est rien. Il s’agit plutôt d’une fuite massive de documents footballistiques confidentiels traités par le réseau européen d’investigation journalistique (EIC) en collaboration avec quinze médias européens. Près de deux ans après la première affaire qui avait fait grand bruit, la seconde risque d’en faire tout autant. Relayée en France par le journal Mediapart le 2 novembre dernier, elle se concentre sur les relations entre l’UEFA et certains clubs européens. Nous apprenons ainsi qu’en 2011 les dirigeants de l’UEFA auraient passé un accord avec ceux du PSG pour que ce dernier puisse échapper aux règles du fair-play financier. Ce n’est cependant pas l’unique révélation. En effet, Mediapart nous informe également que certains grands clubs européens envisageraient de créer une nouvelle compétition privée. Nommée Super Ligue Européenne, il s’agit d’une concurrente directe de la prestigieuse Ligue des Champions. Dans l’optique de comprendre les raisons motivant sa création, nous limiterons ce dossier à cette affaire.
L’organisation de la Super Ligue Européenne déjà établie
Organiser une nouvelle compétition footballistique ne s’improvise pas. La firme financière indépendante Key Capital Partners dont le siège social est à Madrid le sait parfaitement. C’est ce que montre le rapport de treize pages envoyé par l’entreprise aux dirigeants du Real Madrid durant la nuit du 22 octobre 2018. Ainsi, si la compétition ne débuterait pas avant la saison 2020-2021, les modalités de participation seraient pourtant déjà fixées. Suivant le modèle de la Ligue des champions, la Super Ligue Européenne débuterait par une phase de groupes avant des éliminations directes réparties tout au long de la saison. Seize équipes se disputeraient ce nouveau trophée. Parmi elles, onze seraient titulaires. Il s’agit du Bayern Munich, du PSG, d’Arsenal, de Chelsea, de Liverpool, de Manchester City et United, du Real Madrid, du FC Barcelone, du Milan AC et de la Juventus Turin. En tant que titulaires, ces clubs seraient immunisés contre une éventuelle relégation durant les vingt prochaines années. Ce privilège ne serait en revanche pas accordé aux cinq clubs invités. Le Borussia Dortmund, l’OM, l’Atlético Madrid, l’Inter Milan et l’AS Roma ne seraient donc pas à l’abri d’une éventuelle relégation.
Mais connaître les équipes participant à une compétition de football n’est pas suffisant pour l’orchestrer convenablement. En tant que championnat privé, il est également important de disposer de certaines garanties financières. D’après Le Monde, le PSG serait ainsi actionnaire à 6% du projet. C’est loin du Real Madrid. Selon France Football, la part des actions du club espagnol s’élèverait à 18%. Les Madrilènes seraient même l’actionnaire principal de la Super Ligue Européenne selon ce média. Cela permettrait ainsi au club de définir les contours sportifs et les répartitions des droits télévisés.
La Super Ligue Européenne, moyen de pression sur l’UEFA
Les Football Leaks 2 ont révélé au grand public l’intérêt de certains clubs pour la création d’une Super Ligue Européenne. Cette information n’est cependant pas nouvelle dans le monde du football professionnel. C’est ce qu’a affirmé le président de l’Olympique Lyonnais, Jean-Michel Aulas, à la suite du match nul de son équipe face à Bordeaux (1-1) le 3 novembre dernier. Au micro d’Eurosport, il a effectivement affirmé avoir régulièrement entendu parler de ce projet quand il présidait le G14 de mai 2007 jusqu’à sa dissolution en janvier 2008. Il faut dire que le G14 était une organisation regroupant les clubs européens les plus influents. En tant que Président, Jean-Michel Aulas avait alors une place de choix pour entendre parler d’un tel projet.
Plus récemment, la Super Ligue Européenne aurait servi à faire pression sur l’UEFA. C’est ce que nous apprend Mediapart. En menaçant de quitter la Ligue des champions au profit d’une nouvelle compétition privée, certains grands clubs européens auraient usés de leur popularité auprès du public pour que leur pays (Angleterre, Italie, Espagne, Allemagne) obtiennent quatre places en phase de groupe de la C1 au lieu de deux. En sachant que la Ligue des champions perdrait de son attractivité si de grands clubs européens venaient à la quitter, l’UEFA n’aurait alors pas eu d’autres solutions que celle de céder à ce chantage. En août 2016, l’UEFA actait donc la réforme de la C1.
Les clubs européens concernés démentent
Face aux accusations qui pèsent sur eux, les principaux concernés se doivent de répondre. Ancien président des clubs européens (ECA), Karl-Heinz Rummenigge est catégorique. D’après le journal L’Équipe, il nie toute implication concernant la réforme de la Ligue des Champions en août 2016. Selon lui, le vote aurait été unanime. Il n’y aurait donc eu aucun acte au détriment de l’ECA. Par ailleurs, les clubs de football rejettent également tour à tour leur implication éventuelle dans la création d’une Super Ligue Européenne. C’est par exemple le cas du Bayern Munich ou du PSG pour ne citer qu’eux. Pourtant mentionné comme club invité, le président de l’Olympique de Marseille, Jacques-Henri Eyraud, affirme quant à lui ne jamais avoir été consulté à ce sujet.
Ainsi, l’affaire de la Super Ligue Européenne est un véritable problème pour le monde du football professionnel. Si Jean-Michel Aulas affirme disposer de suffisamment de renseignements pour ne pas y croire, la création de la Super Ligue Européenne est toutefois à prendre au sérieux. Que nous y croyons ou non, il est toutefois certain que son existence bouleverserait le panorama footballistique européen. Sans les clubs les plus populaires, la Ligue des Champions perdrait de son prestige. Les championnats seraient également impactés. En effet, en participant à une ligue privée, les clubs concernés y renonceraient.
Crédits photo à la Une: Markos90