Le 7 avril 2019, la Fédération Française de Football fêtait son centenaire. Pour l’occasion, la rédaction d’Au Stade s’est intéressée au contexte de sa création. Dossier.
Le premier match officiel de l’équipe de France de football s’est tenu à Bruxelles face à la Belgique (3-3). C’était le 1 mai 1904. Quinze ans après cette rencontre, le 7 avril 1919, la Fédération Française de Football voit le jour sous le nom initial de Fédération Française Football Association (FFFA). À première vue, ce délai peut donc surprendre. La rédaction d’Au Stade souhaite donc lever le voile sur la création tardive de cette institution footballistique française. Pour cela, il convient donc de s’interroger sur le contexte de son apparition.
Des divergences dans l’organisation du football français
Le football arrive en France dans les années 1870. Le Havre Athletic Club est effectivement le premier club français crée en 1872. Il n’existe alors dans l’Hexagone aucune fédération dédiée exclusivement à ce sport. L’Union des Sociétés Françaises des Sports Athlétiques (USFSA), républicaine et fondée à Paris en 1887, se veut omnisports. Elle organise malgré tout le championnat de France de football de l’USFSA dès 1894. Ce n’est cependant pas l’unique compétition française de football. En effet, la Fédération Gymnastique et Sportive des Patronages de France (FGSPF), catholique, créée en 1898, fonde son propre championnat de France dès 1903. Il en est de même pour la section football de la Fédération Cycliste et Athlétique Française (FCAF), fondée en 1905, qui organise sa première compétition l’année suivante. Néanmoins, la pluralité des championnats n’empêche pas l’USFSA de dominer la gestion du football jusqu’en 1906. Sa contribution dans la création de la FIFA en 1904 le prouve. L’ emprise de l’USFSA sur le football français ne s’est cependant pas fait sans accrocs avec ses concurrents. Dès 1905, l’USFSA interdit par exemple à ses membres d’organiser des rencontres avec les autres fédérations. Dans un contexte de séparation entre l’Église et l’État en France, cette raison est essentiellement politique. Pour bénéficier des subventions de l’État, l’USFSA épouse sa cause en interdisant les rencontres avec des équipes des patronages.
La réponse de ces dernières ne se fait pas attendre. Le 23 mars 1907, la Fédération Gymnastique et Sportive des Patronages de France (FGSPF) fusionne avec la Fédération Cycliste et Athlétique Française (FCAF). Ce regroupement donne naissance au Comité Français Interfédéral (CFI) qui concurrence l’USFSA. Sa démission de la FIFA en 1908 suite à un désaccord concernant l’amateurisme dans le football, lui est probablement fatale. Elle profite effectivement au CFI qui prend l’ascendant sur son rival en intégrant la FIFA à titre provisoire en 1909. Cette position se conforte le 18 mai 1910 lorsque le CFI devient l’unique représentant du football en France au sein de la FIFA. Face à la désolidarisation de ses clubs, l’USFSA demande finalement son adhésion au CFI. Ce dernier l’accepte le 5 janvier 1913.
La première guerre mondiale, vecteur de l’intérêt du football en France
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la première guerre mondiale ne provoque pas l’arrêt des compétitions de football en France. La création de la Coupe Charles Simon -future Coupe de France- le 28 décembre 1916 l’illustre parfaitement. Elle montre également l’intérêt des français vis-à-vis de ce sport durant le conflit militaire. Pratiqué dans les tranchées par les Alliés qui s’ennuient entre les combats, la guerre va ainsi permettre à de nombreux Poilus de s’initier à la pratique du football. Ces derniers se réunissent donc indépendamment de leurs origines sociales autour d’un ballon rond pour combattre leur morosité. C’est en tout cas ce que montre l’historien et ancien professeur de sport, Michel Merckel, dans son livre 14-18, le sport sort des tranchées publié en 2013. Pour l’auteur, la première guerre mondiale permet donc au football de se répandre dans toutes les couches sociales françaises.
La création de la Fédération Française de Football
À l’issue de la première guerre mondiale, l’intérêt des Français pour le football est grandissant. En effet, d’après le journal la Vie au grand air publié le 15 mars 1919, «[l’]opinion unanime réclamait la création d’une fédération unique» dans le but de faire disparaître les rivalités incessantes entre les différentes organisations footballistiques françaises. Le Comité Français Interfédéral (CFI) n’est pas insensible à cette requête. Le 7 avril 1919, il vote ainsi sa transformation en Fédération Française de Football Association (FFFA). Ce changement est approuvé par 23 voix contre 1. Le représentant de l’USFSA désapprouvait effectivement la création de la FFFA. Quoi qu’il en soit, cette élection porte de nombreux espoirs. La Vie au grand air du 15 mars 1919 s’en réjouit. Sa phrase à ce propos est explicite: «La lamentable division dont souffrait jusqu’alors notre football association est sur le point de disparaître pour faire place à l’union sacrée sans laquelle – l’expérience de la guerre est là pour nous le prouver – il n’est point de succès». La création de la Fédération Française de Football Association porte donc de nombreux espoirs. Jules Rimet, premier président de la FFFA, se doit donc d’y répondre.
Aujourd’hui, le nom de la FFFA a changé au profit de celui de Fédération Française de Football (FFF). Quoi qu’il en soit, son centenaire prouve que son objectif d’unification du football français a été rempli. Ainsi, comme l’écrivait Henri Delaunay, secrétaire général, en guise de faire-part de baptême dans l’organe de la FFFA : «Notre grande famille est enfin constituée».
Crédits photo à la Une: Frederic Humbert