Vendredi dernier, Jean-Michel Aulas fêtait son 70e anniversaire. Pour l’occasion, la rédaction d’Au Stade s’est penchée sur cette figure emblématique du football français. Sa gestion de l’Olympique Lyonnais ne fait pourtant pas l’unanimité chez les supporters de l’hexagone. Or, c’est justement aux caractéristiques principales de la vision du dirigeant de l’OL que nous consacrons cet article. Dossier.
«Il faut gérer le club comme une entreprise». Pour Pierre Ménès, auteur du livre Le Pierrot top foot, cette citation résume parfaitement la gestion de l’Olympique Lyonnais par Jean-Michel Aulas. Il faut dire que le président de l’OL n’est pas novice dans ce domaine. Avant de diriger le club, il participe en 1993 à la fondation de la CEGID (Compagnie Européenne de Gestion pour l’Informatique Décentralisée). Président du conseil d’administration – fonction qu’il continue d’exercer malgré la cession de ses dernières parts en 2016- son rôle dans cette entreprise spécialisée dans les progiciels de gestion et de comptabilité n’est pas anodin. C’est donc un véritable homme d’affaires qui est nommé à la présidence de l’Olympique Lyonnais en 1987. En 2017, il avoue même à L’Expansion-L’Express que son intérêt initial pour le club sportif était d’en faire un modèle sur le plan économique à la manière d’une start-up. Mais quelle perception de l’entreprise, Jean-Michel Aulas a-t-il insufflé au club ?
Un centre de formation à la hauteur de ceux des grands clubs européens
Le 29 octobre 2018, l’Observatoire du football CIES publiait un rapport élogieux concernant l’Olympique Lyonnais. Avec 35 joueurs formés à l’OL, le club est le deuxième meilleur centre formateur européen derrière le Real Madrid (36). Ce résultat n’est pas un hasard. C’est plutôt un pari sur l’avenir. Cela est d’autant plus vrai depuis l’instauration en 2010 de la règle du fair-play financier par l’UEFA. Cette réglementation empêche les dépenses excessives des clubs de football professionnels. Par conséquent, acheter des joueurs hors de prix est donc prohibé. Dans ce cas, former des jeunes est une alternative intéressante. En grandissant, les plus talentueux d’entre eux peuvent ainsi rejoindre l’équipe première à moindre coût pour le club formateur. Bien entendu, des erreurs peuvent se produire. On pense par exemple au cas de Nabil Fékir. Après une préformation à l’OL de 2005 à 2007, le joueur ne retrouve le club qu’en 2011-2012. Il ne débute cependant en professionnel que le 28 août 2013 contre le Real Sociedad.
Quoi qu’il en soit, proposer un centre de formation réputé présente également un autre avantage. Il suscite effectivement l’intérêt des clubs européens. Dans ce cas, l’Olympique Lyonnais n’aura alors aucune difficulté à céder certains de ses joueurs à prix d’or. Le cas de Karim Benzema est un bon exemple. Arrivé au centre de formation le 13 mars 1996, l’avant-centre signe ensuite son premier contrat professionnel avec l’OL en 2005 avant d’être transféré en 2009 au Real Madrid pour 35 millions d’euros. Former des jeunes footballeurs talentueux à moindre coût avant d’en revendre certains au prix fort, voilà donc une stratégie entrepreneuriale qui semble gagnante pour l’Olympique Lyonnais et que Jean-Michel Aulas continue de perpétuer.
Le Parc OL, un lieu de consommation multiculturel
Dans une entreprise, il est nécessaire d’investir. Jean-Michel Aulas le sait comme en témoigne la privatisation du parc OL. Le Groupama stadium est ainsi le premier stade français privé. Pour cela, selon Le Point, le groupe OL n’a pas hésité à dépenser 450 millions d’euros. Cette somme paraît astronomique. Pourtant, sur le long terme, le financement s’avérera sans doute rentable. Depuis l’inauguration du Parc OL le 9 janvier 2016, l’affluence moyenne est d’environ 44 512 spectateurs en Ligue 1 d’après le site officiel Groupama stadium. Avec une recette moyenne de 2,1 millions d’euros par match en 2016 selon Le Progrès, Jean-Michel Aulas peut donc être confiant. Dans un entretien accordé à ce média cette même année, il confie ainsi que ces chiffres conforte son «business plan».
Si les amateurs de football représentent une part non négligeable du projet de financement du Parc OL, il convient toutefois de toucher un public plus large pour générer davantage de profits. Le concert de Rihanna le 19 juillet 2016 s’inscrit dans cette démarche. Il en est de même, par exemple, pour l’organisation des matchs de hockey sur glace. La tenue du Winter Game 2016 a ainsi réuni 25 182 spectateurs. Dans un communiqué publié le 30 décembre 2016 par l’Olympique Lyonnais, il s’agissait alors d’un record d’affluence pour un match de hockey en France.
L’innovation, une clé du succès
Le Parc OL attire un large public. Mais pour inciter ces spectateurs à revenir régulièrement, il est indispensable de leur donner le sourire. L’expérience du public au Parc OL doit donc être agréable. C’est sans doute pour cette raison que le Parc OL innove pour être un lieu connecté. En proposant 20 000 connections Wifi simultanées et gratuites, les spectateurs peuvent ainsi partager aisément sur les réseaux sociaux leurs souvenirs. Dans une certaine mesure, on peut alors facilement imaginer que ces publications en direct incitent d’autres personnes à s’y rendre. On est alors dans un cercle vertueux.
Cependant, l’innovation technologique n’est pas le seul facteur à prendre en compte dans la stratégie marketing du Parc OL. Il convient effectivement de s’interroger sur le succès futur de certaines activités. L’eSport est sans doute l’exemple le plus représentatif. En plein essor international, cette discipline a ainsi conduit le club lyonnais à créer sa propre équipe. La citation de Jean-Michel Aulas publiée sur le site de l’Olympique Lyonnais à ce sujet est explicite. Il déclare effectivement que la création de cette équipe «s’insère dans un projet plus large de l’Olympique Lyonnais d’ouverture vers de nouveaux territoires et la volonté de se rapprocher encore de la communauté OL en partageant des expériences onlines à travers le monde ».
Pour conclure, la gestion d’un club sportif n’est pas de tout repos. Jean-Michel Aulas le savait parfaitement en acceptant de diriger l’Olympique Lyonnais. Il n’est cependant pas arrivé démuni à ce poste. Sa carrière en tant qu’homme d’affaires l’avait effectivement parfaitement préparé à cette fonction. Depuis sa nomination en 1987, il applique d’ailleurs à la lettre les techniques entrepreneuriales. Accentuer la politique de formation des jeunes joueurs, investir dans le Parc OL et innover sans cesse sont des procédés qui n’ont aucun secret pour lui. Après tout, comme il le confie à L’Expansion- L’Express en juillet 2017, «le sport est un business comme un autre»…
Crédits photo à la Une: Xavoun