Englué à la 19e place du classement de Ligue 1 (2 points en 4 journées), l’AS Monaco n’a pas encore su endiguer sa brusque descente aux enfers entamée un an plus tôt. Est-ce la fin d’un séduisant projet ou une simple sortie de route ?
« Principal concurrent du Paris Saint-Germain »
L’arrivée de l’oligarque russe, Dmitri Rybolovlev, sur le Rocher a marqué l’histoire de notre championnat. Réussir à relancer une équipe empêtrée en Ligue 2 pour la faire jouer les tout premiers rôles européens en 2017, est un exemple de management sportif. Sous la houlette du nouveau président Vadim Vasilyev, le club de la Principauté investit massivement pour construire une équipe compétitive. De Lucas Ocampos, acheté pour 11 millions d’euros alors que le club jouait en deuxième division, à Radamel Falcao, un des tout meilleurs attaquants de l’époque, recruté pour 43 millions d’euros, le board monégasque a marqué le football français. Longtemps réfractaire aux transferts astronomiques, l’AS Monaco a inauguré une nouvelle ère. Les dirigeants russes ont débarqué avec un modèle basé sur la profitabilité, assez inédit dans notre pays. Sous les ordres de Leonardo Jardim, qui brille par sa capacité à tirer le maximum de ses joueurs, le club excelle et s’installe comme principal outsider. Le titre de champion de France remporté en 2017 constitue l’apogée du projet monégasque: un jeu attrayant, de jeunes pépites revendues à prix d’or et des rentrées d’argent colossales.
Campos Mania
Luis Campos est sans doute le conseiller sportif le plus bankable du moment. Son départ de l’AS Monaco est la première ombre au tableau du projet russe. À l’origine des arrivées de Fabinho (Liverpool), Bernardo Silva (Manchester City) ou bien Thomas Lemar (Athletico Madrid), Campos incarnait pleinement ambitions monégasques. Son appétence pour les joueurs à très fort potentiel a permis au club du Rocher de réaliser des plus-values inimaginables. L’AS Monaco se positionnait comme club tremplin et recrutait aisément les nouvelles pépites. La perte du conseiller portugais a lentement fait vaciller l’équipe monégasque. Le titre de 2017 étant un trompe-l’œil, le club a fait face à d’importantes difficultés.
Luis Campos avait un droit de regard quasi-systématique sur les transferts et une grande marge de manœuvre pour corriger les fautes commises. Son rôle ne se limitait pas au simple statut de recruteur, il se comportait comme le métronome d’un club dépendant de son expertise. L’organigramme interne n’avait plus de sens, son départ paraissait inéluctable. L’AS Monaco s’est sabordé. Incapable de remplacer Campos, le club multiplie les transferts hasardeux et vend ses meilleurs éléments à tour de bras. La stratégie mise en place se mue en politique de trading pur, les dirigeants misant désormais exclusivement sur les jeunes à fort potentiel. L’illusion n’a duré que deux saisons, ponctuée par deux qualifications consécutives en Ligue des champions. Les grands noms se font rares du côté de la Principauté, le projet bat de l’aile.
Jardim OUT
Longtemps adoubé par ses pairs, Leonardo Jardim est réputé imperturbable. Quasi-inconnu avant de débarquer sur le Rocher, l’entraîneur portugais est, depuis 2017, source d’interrogations et de crispations. Remplacé fin 2018 par le novice Thierry Henry, guère plus en réussite sur le Rocher, Jardim revient trois mois plus tard à la tête de l’équipe, avec des garanties. Le technicien sauve de justesse Monaco grâce aux arrivées notables de Cesc Fabregas (Chelsea) ou Gelson Martins (Athletico Madrid). La saison paraît interminable, le jeu pratiqué est poussif. Jardim se retrouve avec plus de 50 joueurs sous contrat professionnel avant le début de cette saison. L’AS Monaco entasse des talents qui tardent à éclore. Le projet n’est plus incarné et se disperse. Les postes offensifs sont bouchés (14 joueurs sous contrat) tandis que le secteur défensif manque cruellement de sang neuf.
Le cas Jardim divise les supporters: il est le coupable idéal pour certains, l’homme de la situation pour d’autres. Nul doute que l’entraîneur monégasque a une part de responsabilité non négligeable sur la déroute du projet sportif. Le dérèglement vient pourtant de plus haut. Incapable de renouveler leur stratégie, les dirigeants monégasques s’emmêlent les pinceaux. La défection du vice-président Vasilyev le 14 février dernier laisse planer l’ombre d’une catastrophe industrielle imminente.
Le projet monégasque n’est pas mort
Cette nouvelle saison démarre très mal, mais laisse entrevoir de l’espoir. Le projet monégasque n’est pas mort, loin de là. La stratégie doit être réaménagée pour pallier l’éclosion tardive des jeunes pousses du club. La période dorée de 2017 est définitivement close avec le départ récent de Radamel Falcao (Galatasaray). Une nouvelle histoire débute. Les talents sont déjà présents dans le club: Aleksandar Golovin doit confirmer tout comme Martins. Transféré pour 40 millions d’euros, Wissam Ben Yedder viendra occuper la pointe de l’attaque, en soutien d’Islam Slimani, vainqueur de la CAN avec l’Algérie. Le retour de Tiémoué Bakayoko au milieu de terrain est une aubaine tout comme l’arrivée en défense centrale de l’ex-joueur d’Alaves, Guillermo Maripàn. L’AS Monaco entame une énième saison de transition qui paraît nécessaire, pour redynamiser un club qui se doit de jouer chaque année les trouble-fêtes. Le bateau chavire, mais ne coule pas. Nouveau projet, nouveaux joueurs, nouvel élan. L’AS Monaco devra rapidement vaincre ses démons pour redevenir un club à part dans le championnat de France.
Crédits photo à la Une: ASMONACO.com