Entre la domination de Primoz Roglic, leader du général, la mainmise de la Jumbo-Visma sur la course et l’insolente précocité du jeune Tadej Pogacar, retour sur la deuxième semaine de course de cette Vuelta riche en événements.
Un Tour d’Espagne cadenassé par les Jumbo-Visma
C’est un fait. La team Jumbo-Visma impose son hégémonie sur le peloton. Il suffisait d’attendre que Primoz Roglic mette les points sur les I et les barres au T lors du contre-la-montre individuel de Pau, en début de deuxième semaine, un exercice dont il était le grandissime favoris. C’est ce qu’il fit. Ni une ni deux, le train de l’équipe hollandaise allait désormais montrer les muscles s’appuyant sur Tony Martin dans la plaine, George Bennett et Robert Gesink en montagne. La mécanique bien huilée de l’armada jaune et noir met systématiquement leur leader en d’excellentes dispositions. En effet, dans son style caractéristique de rouleur-grimpeur, Primoz Roglic, calcul tout, au watt près, creusant inlassablement l’écart sur ses concurrents. L’exercice chronométré de Pau a jeté les bases de son œuvre qu’il fignole le long des routes espagnoles et rien ne semble pouvoir contrarier son accession au trône d’Espagne.
Au-delà de la constance affichée par Roglic et ses compères, l’équipe a pu compter sur son rayonnant Stepp Kuss pour confirmer sa domination sur la course. L’américain de 24 ans s’est adjugé la victoire au sommet du Sanctuaire d’Acebo à l’issus de la 15e étape. Ainsi va la vie au sein des rangs de la Jumbo-Visma: non content de sur-dominer la Vuelta, on se paie le luxe d’envoyer des coéquipiers en échappée pour une victoire d’étape. Signe que tout va pour le mieux dans l’une des équipes les plus ambitieuses pour les prochaines saisons.
L’Espagne c’est la Slovénie
Si Primoz Roglic symbolise le présent avec un sacre annoncé dimanche à Madrid, Tadej Pogacar incarne l’avenir du haut de ses 20 années. Après sa première victoire à Cortal d’Escamp en Andorre, le coureur de l’UAE a récidivé à Los Machucos, signant ainsi la première double victoire d’étape sur un grand tour pour un cycliste de 20 ans depuis Moreno Argentin en 1981 sur le Giro. En plus de ses sucés retentissants, le vainqueur du Tour de l’Avenir 2018 parvient à suivre les tout meilleurs en montagne et pointe aujourd’hui à la troisième place du général (+ 3’42).
C’est la grande révélation de cette Vuelta. Celui qui n’a aucun grand tour à son actif crève déjà l’écran et semble en mesure de jouer un podium. Il est en effet l’homme fort de cette fin de Vuelta, le seul en capacité d’attaquer et de suivre Lopez au Machucos et arrivant loin devant Alejandro Valverde à l’Alto de la Cubilla, son adversaire pour la deuxième place finale. Tadej Pogacar est sur la pente ascendante, aussi bien en terme de forme qu’en terme de carrière.
Et maintenant ?
Le sacre programmé de Primoz Roglic ne doit pas cacher une vérité excitante: le podium va se jouer entre trois hommes en les personnes d’Alejandro Valverde (Movistar), Tadej Pogacar (UAE) et Miguel Angel Lopez (Astana). Le vétéran et champion du monde ne présente plus les mêmes garanties sur les Grands Tours qu’en 2016 et semble connaître une forme descendante. Son expérience est son seul atout tout comme son avance sur ses deux concurrents. Il a les cartes en main et le crédit du public espagnol pour lui.
Ensuite, Tadej Pogacar, l’homme en forme et celui qui nous étonne de jour en jour. Il n’a pas cessé de reprendre du temps à Alejandro Valverde sur la seconde semaine. De plus, il termine toujours avec les plus forts, engrange de la confiance et se transcende à mesure que Madrid approche. Les zones d’ombre résident dans le fait qu’il en est à son premier Grand Tour, qu’on a déjà vu des jeunes coureurs exploser en troisième semaine et que son expérience en est de fait limitée.
Miguel-Angel Lopez propose également de bonnes garanties. Il a su rebondir et mettre en place une stratégie gagnante en demandant à ses coéquipiers de rouler pour faire craquer Nairo Quintana et ensuite attaquer pour avoir raison de Valverde. La forme est aussi pour lui, à l’image du prodige slovène d’autant plus que les forts pourcentages sur la Vuelta, qui ne sont pas ses terrains d’expression favoris sont derrière lui. Cependant, il a beaucoup de temps à reprendre à ses deux concurrents et son étiquette d’attentiste ne joue pas pour lui…
Crédits photo à la Une: filip bossuyt