L’arrivée ce dimanche sur les Champs Élysées a marqué la fin du 104e Tour de France. Après 3 540 kilomètres parcourus et près de 90 heures d’efforts, le dénouement de cette Grande Boucle est connu. L’occasion pour la rédaction d’Au Stade de revenir sur cette dernière semaine, qui malgré son manque de suspens, nous a fait vibrer.
Michael Matthews sort les griffes
Le sprinteur australien Michael Matthews (Sunweb) a remporté la première étape de cette troisième semaine entre le Puy-en-Velay et Romans-sur-Isère. Sur un profil accidenté, son équipe a su mettre en difficulté le meilleur sprinteur de ce Tour de France dès la première difficulté de la journée. En effet, Marcel Kittel (Quick-Step Floors), orné de sa tunique verte, n’a pu suivre le peloton dans la côte de Boussoulet placée à 143 kilomètres de la ligne d’arrivée. L’allemand ne pourra revenir dans le jeu. Une aubaine pour Michael Matthews, dauphin du malheureux au classement par points. Passé en tête au sprint intermédiaire, le coureur au look de surfeur amorce une remontée fantastique pour l’obtention du maillot vert. Les échappés repris, le sprint final à Roman-sur-Isère semble offert à l’australien. Personne ne pourra enlever la victoire à Michael Matthews qui devance Edvald Boasson-Hagen (Dimension-Data) et John Degenkolb (Trek-Segafredo). Avec l’opération blanche de Marcel Kittel et le carton plein de son premier poursuivant, le maillot vert du sprinteur allemand est plus que jamais en danger.
Primoz Roglic, ou la polyvalence incarnée
Étape mythique, étape mirifique. Cette rime résume à elle seule la dix-septième journée, tracée entre la Mûre et Serre-Chevalier. Sur cette étape de haute montagne reprenant les routes légendaires du Tour de France, a émergé un vainqueur surprise: Primoz Roglic (LottoNL-Jumbo). Habitué aux gros braquets et aux longs bouts droits, le Slovène a surpris son monde par son ascension fantastique de la dernière difficulté de la journée: le Galibier. Impressionnant de facilité, il a laissé désemparés les meilleurs grimpeurs de l’échappée en les personnes d’Alberto Contador (Trek-Segafredo), Darwin Atapuma (UAE Team Emirates), Mathias Frank (AG2R La Mondiale) et Serge Pauwels (Dimension-Data). Royal sur la route historique du redoutable col alpestre, il n’en a pas été moins impérial sur le replat l’emmenant à Serre-Chevalier. Seul face au vent sur les dix derniers kilomètres de plat, le rouleur slovène n’a cédé aucune seconde à ses poursuivants, le groupe maillot jaune pourtant en réelle supériorité numérique. À l’arrivée, Primoz Roglic s’impose avec une avance confortable de 1’18” sur son dauphin. Le mètre de la polyvalence lève timidement les bras, inhabitué a célébré ses victoires, lui qui brille le plus souvent sur l’exercice du contre-la-montre.
L’attaquant Fabio Aru n’a pu se défendre
Sur les fortes déclivités menant au sommet du Galibier, à 2 642 mètres d’altitude, Fabio Aru (Astana) a craqué. Juge de paix de la dix-septième étape, le géant des Alpes a créé des désillusions. Lâché dans les derniers hectomètres de l’ascension, l’Italien s’est retrouvé isolé sur le replat vers Serre-Chevalier. À l’arrivée, l’addition est salée pour le Sarde qui concède 31” sur les principaux protagonistes. Dans un Tour où seul une confortable avance pouvait faire entrevoir la victoire, quelques secondes de retard sont déjà de trop.
Warren Barguil écrit l’histoire à l’Izoard
L’Izoard, théâtre des Grands du Tour, a jugé en son sommet l’arrivée de la dix-huitième étape de la Grande Boucle. Sur les pentes abruptes de ce Col légendaire, récemment encore vierge de toute ligne finale, seul un champion pouvait s’imposer. Ce champion est venu, et revenu de loin. Déjà vainqueur ce 14 Juillet à Foix, Warren Barguil (Sunweb) a surgi du groupe des favoris dans les ultimes kilomètres de l’étape pour avaler le dernier rescapé de l’échappée matinale, Darwin Atapuma (UAE Team Emirates). Rien n’a pu résister à la chevauchée fantastique du français. Rattrapant et distançant dans un premier temps le fuyard colombien, Warren Barguil a su résister par la suite au retour des cadors, qui ont jeté leurs derniers espoirs de jaune dans l’ascension finale. En marge cette année du classement général, le jeune breton a su profiter des bons de sortie du peloton pour s’exprimer librement sur les routes de juillet. Avec deux victoires étapes, une seconde place sur la neuvième journée, un Top 10 au classement général et le maillot à pois sur ses épaules, Warren Barguil a soulevé les foules, a éclaboussé de tout son talent la Grande Boucle. Après la Voeckler-Mania des années 2010, c’est la Wawa-Powa qui a fait vibrer le public français.
Enfin un bouquet pour Edvald Boasson-Hagen
Après l’abandon de son sprinteur Mark Cavendish (Dimension-Data), Edvald Boasson-Hagen (Dimension Data) a additionné les places d’honneurs avec sa nouvelle casquette de leader. Passé à plusieurs reprises à côté de la victoire (à moins de six millimètres face à Marcel Kittel sur la septième étape) avec cinq podiums acquis au sprint, le Norvégien a fini par enlever la dix-neuvième étape en solitaire. Préférant arriver seul à Salon-de-Provence, il est sorti du groupe échappé à deux kilomètres de la ligne. L’offensive s’est révélée victorieuse. Edvald Boasson-Hagen signe donc son troisième succès sur la Grande Boucle, six ans après le premier. Après une longue période de disette au sein du team Sky, le Norvégien a retrouvé une seconde jeunesse dans sa nouvelle équipe sud-africaine. Animateur des classiques, acteur des sprints massifs et baroudeur redoutable, il est en effet en grande forme depuis son changement de maillot. Fort de sa polyvalence, le trentenaire a déjà neuf bouquets en 2017.
Les rouleurs polonais domptent Marseille
Maciej Bodnar (Bora-Hansgrohe), héros malheureux de Pau où il avait été repris à deux cents mètres de la ligne après 174 kilomètres d’échappée et 28 kilomètres de baroud solitaire, a finalement été récompensé de ses performances ce samedi à Marseille. Sur le contre-la-montre de 22,5 kilomètres, seule la difficile côte de Notre-Dame de la Garde a cassé le rythme du rouleur. Une difficulté qui a écarté de la course les moins bons grimpeurs parmi les spécialistes de l’effort solitaire. Maître du 56/11, gregario modèle, Maciej Bodnar a signé la plus grande victoire de sa carrière au Vélodrome, devançant d’une petite seconde son compatriote Michal Kwiatkowski (Sky). Dans la lumière de l’arène Marseillaise ce sont finalement les hommes de l’ombre qui ont brillé, les précieux coéquipiers sans qui les protagonistes ne pourraient briller.
Romain Bardet a craqué au plus mauvais moment
Ce samedi à Marseille, le contre-la-montre de 22,5 kilomètres s’annonçait décisif. Largement inférieur au leader Christopher Froome (Sky) sur l’exercice solitaire, Romain Bardet (AG2R La Mondiale) avait l’objectif de conserver sa seconde place au classement général avant le départ. Mais fatigué après presque trois semaines de course, le Brivadois a eu un long passage à vide sur l’épreuve. Deuxième place envolée et troisième sauvée de peu (1”), Romain Bardet a eu très chaud. Il a néanmoins assuré l’essentiel; le podium.
Dylan l’audacieux
Gagner sur les Champs Élysée, rêve absolue de tous les sprinteurs. Mais peu d’entre eux ont et auront l’occasion de le réaliser. Dylan Groenewegen (LottoNL-Jumbo) lui ne connaissait pas encore la joie de la victoire sur le Tour avant de se présenter sur la plus belle avenue du monde. En l’absence de Marcel Kittel (Quick Step-Floors), Mark Cavendish (Dimension-Data), Arnaud Démare (FDJ), et Peter Sagan (Bora-Hansgrohe), l’opportunité de marquer l’Histoire des Champs était immense. Une occasion qu’a saisie Dylan Groenewegen. Face à ses principaux adversaires, André Greipel (Lotto-Soudal) et Edvald Boasson-Hagen (Dimension-Data), le jeune Néerlandais a lancé audacieusement son sprint à plus de 250 mètres de la ligne. Un choix risqué tant l’effort est long, mais payant. Personne n’a pu en effet devancer le jeune sprinteur qui s’offre ici le plus gros succès de sa jeune carrière.
Les tops/flops de la troisième semaine
LES TOPS:
– L’excellente dernière semaine de Primoz Roglic, Warren Barguil, Michal Kwiatkowski et Maciej Bodnar.
– La cinquième victoire française sur le mythique Col d’Izoard.
LES FLOPS:
– Un Tour sans grand suspense, avec un contre-la-montre final trop décisif.
– L’attentisme de certains protagonistes comme Rigoberto Uran.
– Des places d’honneur trop souvent défendues dès la deuxième semaine.
– Une équipe Sky sur-dominatrice
Le point sur les maillots distinctifs
Le maillot jaune – Sans grande surprise, il est revenu au Britannique Christopher Froome (Sky) qui a dominé ses adversaires sur le dernier exercice chronométré. Avec 54” secondes de retard sur le vainqueur, le discret Rigoberto Uran (Cannondale-Drapac) prend la deuxième place d’un podium complété par le Français Romain Bardet (AG2R La Mondiale) relégué lui à 2’20”. Quant à l’Espagnol Mikel Landa (Sky), il échoue à une petite seconde de la troisième marche du classement général final.
Le maillot vert – La « remontada » de Michael Matthews (Sunweb) en début de troisième semaine a relancé la course au classement par points. Une bataille vite terminée par l’abandon du leader, Marcel Kittel (Quick-Step Floors). L’Australien rafle donc sa première tunique verte.
Le maillot à pois – Consolidé par sa victoire au sommet de l’Izoard, le maillot de meilleur grimpeur de Warren Barguil (Sunweb) n’a trouvé aucun outsider en dernière semaine. Le jeune français a donc enlevé son premier classement annexe.
Le maillot blanc – Avec une confortable avance constituée dans les deux premières semaines, Simon Yates (Orica-Scott) n’avait qu’à surveiller attentivement son dauphin Louis Meintjes (UAE Team Emirates). Un marquage efficace qui permet au Britannique de succéder à son frangin, Adam Yates (Orica-Scott). Il devance le Sud-Africain de 2’06” et la jeune pépite allemande Emanuel Buchmann de 27’07”, premier coureur germanique au classement général.
Crédits photo à la une: Bald Boris