Après plus d’une semaine de course, la rédaction d’Au Stade fait le point sur ce début de Tour de France. Victoires, chutes, disqualifications, cette première semaine de course a été riche en émotions.
La Sky déjà en pole position
Vainqueur surprise du contre-la-montre inaugural, Geraint Thomas (Sky) a été le premier porteur de la tunique jaune. Parti en milieu d’après-midi, l’homme de 31 ans a surpris son monde en réalisant une moyenne de 52,37 km/h sur le parcours chronométré. Derrière, le grand favori Tony Martin (Katusha-Alpecin) n’a pu s’aligner sur la fusée galloise, peut-être la conséquence d’un parcours trop technique pour l’allemand et d’un vent beaucoup plus présent en fin d’après-midi (Panzerwagen enlèvera finalement la quatrième place).
La Sky prend donc, de ce fait, les commandes de la Grande Boucle. Des responsabilités prisent précocement grâce à l’ex-pistard gallois. Malchanceux et parti trop tôt du Giro d’Italia qu’il avait minutieusement préparé, Geraint Thomas aurait pu, au vu de ses dernières performances, jouer les premiers rôles aux côtés de Chris Froome. Mais la neuvième étape aura eu raison de lui. À terre sur la route ralliant Chambéry, Geraint Thomas est contraint à l’abandon (clavicule cassée).
Sur le premier exercice chronométré, l’équipe de Christopher Froome a impressionné en plaçant quatre coureurs dans le top 10 de l’étape (1er Geraint Thomas, 3e Vasil Kiryienka, 6e Chris Froome et 8e Michal Kwiatkowski). Des résultats qui sont à l’origine d’une contestation. En effet, les coureurs du team Sky ont porté lors de cet exercice des textiles équipés d’une technologie aérodynamique. Un matériel interdit par le règlement mais validé par les organisateurs. Des décisions inexpliqués, qui ont eu une conséquence directe sur le classement général. Affaire à suivre dans le prochain contre-la-montre à Marseille.
Un contre-la-montre plus que piégeux
Le contre-la-montre inaugural du Tour de France a fait des victimes au sein du peloton. Sur un parcours technique et sur une chaussée détrempée, les peintures signalétiques au sol s’apparentaient à de vraies patinoires. Ces conditions n’ont pas été sans conséquences. C’est malheureusement l’image de cette première étape; la chute impressionnante d’Alejandro Valverde (Movistar), contraint à l’abandon. Le lieutenant de Nairo Quintana est vraisemblablement a été touché à la rotule. Saison terminée pour l’espagnol. Cas similaire pour son compatriote et leader du team Bahrain-Merida, Ion Izagirre, qui a chuté sur cette première étape pluvieuse. Deux leaders ont conséquemment déjà dû quitter la course sur cette 104e édition.
Marcel Kittel déjà roi
En remportant sur cette première semaine trois des quatre étapes dédiées au sprinteur, l’allemand Marcel Kittel (Quick Step-Floors) s’affiche comme LE sprinteur de ce Tour de France. Loin des chutes, des sprints houleux et des disqualifications, il a su faire parler sa puissance et son incroyable pointe de vitesse. Avec le maillot vert sur ses épaules après 9 étapes ainsi qu’une adversité qui tend à décroître (abandon de Mark Cavendish, disqualification d’Arnaud Démare et exclusion de Peter Sagan), Marcel Kittel pourrait bien continuer à étoffer son palmarès (12 victoires sur le Tour de France) sur les routes de juillet. Avec trois victoires déjà enlevées et un statut de favori pour les sprints massifs, l’allemand est en pôle position pour la tunique verte qu’il porte actuellement. Le prochain grand rendez-vous pour les “gros bras” du peloton est mardi avec une arrivée à Bergerac qui ne devrait pas leur échapper.
Arnaud Démare s’offre son premier bouquet sur le Tour
À Vittel, personne n’a pu résister à Arnaud Démare (FDJ). Avec le maillot tricolore sur les épaules, il s’est imposé pour la première fois de sa jeune carrière sur les routes de la Grande Boucle. Après un sprint houleux, “Nono” (surnom affectif donné par Marc Madiot à Arnaud Démare) a pris le meilleur de Peter Sagan (Bora-Hansgrohe) et d’Alexander Kristoff (Katusha-Alpecin). Endossant par la même occasion la tunique verte, le français a fait coup double à Vittel, ville natale de son grand ennemi Nacer Bouhanni (Cofidis). Mais les premières étapes de haute montagne ont eu raison du français. Malade au plus mauvais moment de la semaine, il n’a pu rallier l’arrivée dans les délais à Chambéry.
Sagan injustement exclu ?
L’arrivée de la troisième étape à Vittel a fait crier le monde du cyclisme. La première victoire française de ce Tour de France en est pour quelque chose, mais pas exclusivement. Le sprint houleux a fait des victimes et le responsable désigné a eu une sanction plus que discutable: l’exclusion. Peter Sagan (Bora-Hansgrohe), victorieux la veille à Longwy, est pointé du doigt par les commissaires. Serait-il responsable de la chute de Mark Cavendish ? Sur les vidéos à vitesse réelle et sans vraiment chercher minutieusement le fautif, il n’y a aucun doute. Peter Sagan donne bien un coût de coude à Mark Cavendish, qui l’envoie directement dans les barrières. Mais le britannique n’a-t-il pas était trop audacieux en tentant de se faufiler entre le champion du monde et les barrières de sécurité ? N’a-t-il lui-même pas provoqué son propre déséquilibre ? Si on regarde les images de beaucoup plus près, il semblerait que ces hypothèses soient vérifiées. Déséquilibré par sa propre responsabilité, Mark Cavendish se couche alors légèrement sur le Slovaque qui cherche donc à se rééquilibrer en désaxant son coude vers l’extérieur. Subtil mais capital. Les commissaires auraient donc pris une décision à la va-vite ? Difficile à croire. La sanction a été prise en deux temps. Une première déclassait Peter Sagan de l’étape, puis quelques heures plus tard l’excluait du Tour. Décision inexplicable qui s’avère très sévère.
Fabio Aru frappe fort à la Planche des Belles Filles
La première arrivée jugée en altitude a vu briller le champion d’Italie Fabio Aru (Astana). À La Planche des Belles Filles, l’italien a impressionné en s’échappant du groupe des favoris à 2,4 kilomètres de la ligne. Avec un coût de pédale impressionnant, et une danseuse efficace, il a réussi à prendre 20” d’avance sur ses adversaires directes. Comme son compatriote et ancien coéquipier Vincenzo Nibali, il s’est imposé à la Planche des Belles Filles avec le maillot tricolore italien. Deux semaines après sa victoire à la Planche, le requin de Messine avait lui remporté le Tour de France. Le jeune italien pourra-t-il copier son prédécesseur?
Le feux d’artifice de Lilian Calmejane
Premier Tour de France et première victoire pour l’albigeois du team Directe Energie, Lilian Calmejane. Parti en début de mâtiné sur la huitième étape menant aux Rousses, il a su s’économiser au sein d’un groupe d’une cinquantaine de coureurs pour porter l’estocade fatale dans la dernière ascension. Malgré la présence de coureurs de renom comme Mikel Landa (Sky), Thomas De Gendt (Lotto-Soudal), Sergio Henao (Sky), Warren Barguil (Sunweb), Robert Gesink (Lotto-NL Jumbo) ou encore Mathias Frank (Ag2r la Mondiale), Lilian Calmejane ne s’est pas laissé impressionner et a fait preuve d’une grande maturité en se faisant discret à l’avant pour finalement s’extirper au moment opportun. Suite à un écrémage important à l’avant, il compose avec Robert Gesink et Serge Pauwels (Dimension-Data) le trio de tête à 18 kilomètres de l’arrivée. Moment choisi par l’albigeois pour porter son attaque. Seul Robert Gesink tente de le suivre, en vain. Une dernière frayeur sous l’arche des derniers quatre kilomètres donne des sueurs froides au public français. En effet, Lilian Calmejane pris de crampes, doit ralentir brutalement, sur quelques mètres. Mais la victoire est au bout et rien ne l’arrêtera plus. Après une victoire sur sa première Vuelta en 2015, il récidive sur le Tour en entrant son nom sur le palmarès de la Grande Boucle pour sa première participation.
Nantua-Chambéry, une étape dantesque qui a fait des victimes
Sur le roadbook, l’étape du 9 Juillet ne laissait personne indifférent. Avec au programme, les trois premiers cols hors-catégories de cette 104e édition, la neuvième étape s’affiche comme la première grande étape où le Tour pouvait se gagner. Mais aucun favori n’a pris d’option sur la victoire finale dans cette étape. Néanmoins beaucoup se sont éloignés du podium à Paris. Sur la ligne d’arrivée ce dimanche, beaucoup de leaders ont concédé du temps sur le groupe n°1 composé de Warren Barguil (Sunweb), Christopher Froome (Sky), Romain Bardet (AG2R-La Mondiale), Rigoberto Uran (Cannondale-Drapac), Fabio Aru et Jakob Fuglsang (Astana). Nairo Quintana a rallié Chambéry avec 1’15 » de retard, Alberto Contador a concédé 4’19 » et Esteban Chaves 29’15 » sur les vainqueurs. Addition salée donc pour certains protagonistes qui ont évité le pire: la chute. Ce ne fut pas le cas pour le malheureux Richie Porte (BMC), le grimpeur kazakh Alexey Lutsenko (Astana), le malchanceux Geraint Thomas (Sky), le Polonais Rafal Majka (Bora-Hansgrohe) et l’Irlandais Dan Martin (Quick Step-Floors). L’australien est le coureur qui a été le plus touché. Victime d’une lourde chute dans la descente technique du Mont du Chat, il souffre d’une fracture de la clavicule. Le grimpeur du team BMC a été donc contraint d’abandonner mais plus de peur que de mal après sa spectaculaire chute.
Fabio Aru et Christopher Froome, la polémique enfle
La neuvième étape entre Nantua et Chambéry a donné lieu à une situation des moins fair-play. Victime d’un problème mécanique dans la dernière ascension, Christopher Froome (Sky) lève la main pour prévenir au plus vite sa voiture d’assistance. Dans sa roue, Fabio Aru (Astana) semble ne pas s’en préoccuper et attaque à ce moment précis. L’Italien a-t-il vu la défaillance du maillot jaune ? Vraisemblablement non, puisque selon ses dires, il aurait stoppé sa chevauchée en apprenant à l’oreillette les problèmes du tenant du titre. Propos confirmés par l’image. Mais aussitôt Christopher Froome revenu au sein du peloton, il assène un coup de coude violent au champion d’Italie. Geste volontaire ou de déséquilibre ? À l’arrivée, le maillot jaune annonce ne pas avoir vu l’attaque de l’italien et explique son geste peu sportif par un déséquilibre à cause d’un spectateur. Affaire à suivre entre le premier et le second du classement général.
Le point sur les classements annexes
Maillot vert – Après l’exclusion de Peter Sagan, l’abandon de Mark Cavendish et la disqualification d’Arnaud Démare, le chemin semble être tout tracé pour Marcel Kittel qui compte 52 points d’avance sur Michael Matthews (Sunweb). Une avance confortable mais largement pas suffisante pour assurer la victoire de l’allemand. A suivre dans le prochain massif montagneux où il faudra s’échapper pour faire la chasse aux points.
Maillot à pois – Après sa chevauchée fantastique conclue par une second place à Chambéry, Warren Barguil (Sunweb) porte le maillot de meilleur grimpeur. Solidement attaché sur les épaules du français, le maillot à pois est convoité par de nombreux coureurs comme Primoz Roglic (Lotto-NL Jumbo), second du classement. Avec 30 points d’avance sur son dauphin, Warren Barguil aura maintenant à cœur de défendre cette tunique. Prochain grand rendez-vous dans les Pyrénées.
Maillot blanc – Le classement du meilleur jeune est dominé par Simon Yates (Orica-Scott). Avec 2’52 » d’avance sur le deuxième, Louis Meintjes (UAE Emirates), le jeune britannique a pris une sérieuse option sur la tunique blanche. Le frangin du tenant du titre a fait forte impression en début de Tour. Histoire à suivre dans les Pyrénées qui sera un passage déterminant pour l’acquisition du maillot du meilleur jeune.
Crédits photo à la une: filip bossuyt