Ouf ! C’est fini ! Cette première semaine s’achève sur un sentiment amer. ASO n’a pas réussi son pari de rendre ces huit étapes intéressantes dans l’ombre du sprint final de la Coupe du Monde 2018, même l’étape des pavés n’a pas relevé un début de Tour où la sieste fut de mise, ce que les coureurs n’ont pas démenti.
Le match entre les sprinters a eu lieu
Ce fut un vrai combat de boxe entre sprinters et la nouvelle génération. Cette dernière semble pouvoir prendre le pouvoir, mais il reste Peter Sagan pour la calmer. Kittel, Cavendish ou encore Greipel n’ont cependant rien pu faire, les jeunes arrivent en force. Pour son premier Tour de France, Fernando Gaviria s’est imposé sur la première étape à Fontenay-le-Comte et a remis le couvert trois jours plus tard à Sarzeau. Si les deux victoires parlent pour lui, le colombien a montré une force de résistance incroyable, lançant son sprint tôt sur le premier bouquet et allant chercher Greipel sur le second. Ce même duel avec l’allemand a cependant été trop intense à Amiens, théâtre de l’arrivée de la huitième étape, où le gorille de Rostock a répondu d’un coup d’épaule au coup de casque d’El Misil, un surnom qui va déjà très bien au sprinter de 23 ans de l’équipe Etixx-Quick Step. Les deux coureurs ont été disqualifiés, permettant à Sagan de prendre son aise en tête du classement par points.
Le slovaque, chirurgical de régularité, a encore été dans tous les bons coups sur cette première semaine. A la Roche-sur-Yon, dans le final de la deuxième étape, il était idéalement bien placé pour éviter une chute dans l’un des derniers virages qui a emporté Gaviria, alors en jaune, et Christophe Laporte, symbole de la nouvelle génération du sprint français tandis que Démare a patiné sur cette première semaine. A Quimper, il s’est imposé en patron, déboîtant derrière le maillot jaune Greg Van Avermaet, pour lever les bras. Deux victoires, comme Gaviria, mais des podiums sur chaque sprint massif de ce début de Tour de France. Le maillot vert lui tend déjà les bras…
Il était encore deuxième à Amiens, profitant du déclassement de Gaviria et Greipel, deuxième derrière le néerlandais Dylan Groenewegen (Lotto NL-Jumbo) qui confirme sa victoire sur les Champs l’année dernière. Avec deux bouquets en deux jours, à Chartres et à Amiens, il s’impose comme l’un des sprinters de cette 105ème Grande Boucle et, à 25 ans, il porte fièrement les espoirs d’un sprint hollandais qui s’est longtemps cherché. Ce combat intense dans les sprints massifs ne peut cependant masquer des étapes ennuyeuses. On se demanderait même pourquoi la 7ème étape toute plate entre Fougères et Chartres, la plus longue de ce Tour, faisait 231 kilomètres. Cette première semaine fut ainsi assez insipide, offrant peu de rebondissements, même les baroudeurs étaient réticents à partir en échappée, ce que regrettait Yoann Offredo, seul à l’avant vendredi dernier.
Des favoris prudents avant Annecy
Les favoris ont été discrets et se sont montrés seulement contre leur gré. Les chutes de la fin de la première étape ont coûté cher à Nairo Quintana, la Movistar n’étant pas à son avantage sur le contre-la-montre par équipes qui n’a pas vu de gros écarts entre les gros coureurs. La BMC, qui a remporté ce chrono, a permis à Greg Van Avermaet de prendre le maillot jaune et le belge le possède toujours avant d’entrer dans les Alpes. Chris Froome avait également perdu du temps lors de cette première étape à la fin houleuse mais la Sky a su rattraper le retard de son leader. Néanmoins, à l’aube du tryptique alpin, c’est Geraint Thomas qui est le mieux placé dans la formation britannique. Le gallois est deuxième du général à 43 secondes de Van Avermaet. Il sera intéressant de voir comment la Sky va gérer cette situation inconfortable pour Froome comme pour Thomas.
Romain Bardet, lui, est un miraculé. Si AG2R a bien géré le chrono par équipes autour de Cholet, le coureur français a connu un dimanche terrible sur les pavés de l’Enfer du Nord. Avec trois crevaisons dont une sur le premier secteur et une autre sur le dernier secteur, il a tout de même réussi à ne concéder que sept secondes sur les favoris, bien aidé par une équipe solide emmenée par Oliver Naesen, le spécialiste des classiques flandriennes de l’équipe de Vincent Lavenu. Le français, en qui tout le monde croit dans un Hexagone exalté par le titre de champion du monde de l’équipe de France du football, a prouvé qu’il avait des jambes et un mental en bon état, de bon augure avant la montagne qui se profile dès demain.
Un autre favori n’a pas eu la même chance. A l’instar de son ancien leader, Chris Froome, qui avait quitté le Tour 2014 avant même le premier secteur, Richie Porte a laissé ses équipiers de la BMC après seize petits kilomètres sur cette neuvième étape où Tejay Van Garderen a également chuté. Van Avermaet comptait bien éclaircir le tableau de l’équipe américaine hier mais, s’il a conservé son maillot jaune, il a échoué à la deuxième place à Roubaix derrière le revenant John Degenkolb, ému de ce retour sur le devant de la scène, lui qui avait remporté Paris-Roubaix 2015 avant d’être renversé et blessé grièvement par une conductrice à contre-sens avec cinq de ses équipiers de la Giant, dont Warren Barguil, en stage en Espagne en janvier 2016.
Finalement, le suspense est encore de mise avant d’attaquer le menu alpin très chargé qui s’achèvera à l’Alpe d’Huez jeudi. Les favoris sont tous bien calés dans le top 30. Environ 2’40’’ sépare Geraint Thomas, deuxième, et Dan Martin, 24ème. L’irlandais avait glané dix secondes de bonifications en s’imposant en costaud au sommet de Mûr-de-Bretagne. Cela devrait bouger dès demain entre Annecy et Le Grand-Bornand avec un passage par le très attendu plateau des Glières.
Crédits photo à la Une: Felouch Kotek