Après avoir dominé les Alpes, Geraint Thomas n’a pas eu besoin de forcer pour asseoir son maillot jaune dans les Pyrénées où Christopher Froome a flanché sans rompre, terminant sur le podium. Entre les deux, Tom Dumoulin échoue à remporter son deuxième Grand Tour tandis que la Lotto NL-Jumbo place deux hommes dans le top 5.
Thomas défend facilement sa tunique jaune
Trois étapes pyrénéennes, un contre-la-montre, voilà ce qu’il restait aux concurrents de Geraint Thomas pour lui chiper le maillot jaune. Mais après avoir pris deux bouquets dans les Alpes, le gallois ne s’est pas laissé faire. Après avoir passé la première journée sans encombre lorsque Julian Alaphilippe levait pour la deuxième fois les bras à Bagnères-de-Luchon, Thomas n’a pas eu à forcer dans le Portet. Si Nairo Quintana, auteur d’un Tour en demi-teinte, a devancé l’explication entre les favoris pour s’imposer dans cette étape courte de 65 kilomètres où les mouvements furent rares, les favoris se sont marqués…sauf Froome et Bardet. Le britannique a confirmé le leadership de son coéquipier en craquant, ne parvenant même pas à suivre le colombien Egan Bernal qui avait pourtant travaillé juste avant, tandis que le français a connu une journée difficile lors de laquelle son physique lui a joué des tours. Ce sont donc Kruijswijk, Roglic et Dumoulin qui ont tenté de s’attaquer au maillot jaune. Celui-ci s’est défendu parfaitement et a attaqué Dumoulin et Roglic dans les derniers hectomètres pour prendre la seconde de bonification derrière Quintana et Martin. Il ne faisait quasiment plus aucun doute que le gallois se dirige vers son premier Tour de France.
Lors de la dernière journée pyrénéenne, il lui fallait tout de même confirmer ce Tour de France de haute volée. Ce fut la plus belle étape de cette édition, dynamitée dès le Tourmalet en cours d’étape par Mikel Landa et Romain Bardet. Ces deux derniers, après avoir lâché leurs compagnons d’échappée, sont repris par le groupe maillot jaune dans l’Aubisque où Quintana fut porté disparu. Chris Froome est une nouvelle fois mis en difficulté par le quatuor Kruijswijk-Roglic-Dumoulin-Thomas mais s’accroche pour basculer dans le bon wagon. Auteur d’une descente remarquable et attaquant au pied, Primoz Roglic remporte sa deuxième victoire sur le Tour après celle récoltée l’année dernière à Serre-Chevalier et monte sur le podium au détriment de Froome. Deuxième, Thomas finit d’assommer la concurrence. Le contre-la-montre ne peut être décisif avec les deux minutes d’avance qu’il possède sur le champion du monde de la discipline Tom Dumoulin.
Un temps menacé par Chris Froome, Tom Dumoulin réalise une fin de chrono épique pour s’imposer avec une seconde d’avance sur le britannique. Roglic, pourtant bon rouleur, passe à côté de son contre-la-montre et doit se contenter de la quatrième place finale devant son coéquipier Kruijswijk et Bardet qui prend la sixième place à Landa. Thomas, lui, peut savourer son maillot jaune : avec le troisième temps du chrono, il n’a pas tremblé pour s’adjuger son premier Tour de France.
Démare et Kristoff sauvent leur Tour
Il restait deux occasions aux sprinters lors de cette dernière semaine : l’étape de Pau sauf si les équipes de sprinters n’ont plus assez de forces et les Champs-Elysées. Finalement, avec une équipe Groupama-FDJ au complet, le peloton est arrivé groupé à Pau où Arnaud Démare a enfin levé les bras, la deuxième victoire de sa carrière sur le Tour, devançant Christophe Laporte pour un doublé français inédit sur un sprint massif. Peter Sagan, affaibli par sa chute quelques jours avant, n’est pas en mesure de disputer le sprint. Sur les Champs-Elysées, dimanche, malgré le baroud d’honneur d’Yves Lampaert, c’est bien à un sprint auquel nous avons assisté. Alexander Kristoff, en costaud, a été plus rapide que tout le monde pour s’offrir son premier bouquet sur le Tour depuis quatre ans et l’édition 2014 lors de laquelle il avait remporté deux étapes à Saint-Etienne et Nîmes. Longtemps placé, jamais vainqueur, le norvégien vient avec cette victoire de prestige sauver son Tour de France et relever sa saison peu flamboyante. Cette année, les sprints du Tour ont fait la part belle aux jeunes, Fernando Gaviria et Dylan Groenewegen confirmant leur potentiel et Christophe Laporte se révélant. Néanmoins, avec un sixième maillot vert en sept participations, Peter Sagan reste le patron du classement par points.
On change l’homme mais pas l’équipe
Que retenir de cette édition chez les favoris ? Pas grand-chose si ce n’est un changement de visage en jaune. Après sa victoire sur le Giro, Christopher Froome a calé dans la dernière semaine du Tour, ne pouvant réaliser le doublé. Mais dans une équipe aux talents multiples en montagne, c’est Geraint Thomas qui a pris la relève, ce qui n’a cependant pas permis d’atténuer les critiques envers l’équipe britannique qui fait face à la méfiance d’une partie des suiveurs. Elle a encore une fois remporté le Tour de France, pour la sixième fois en sept éditions, et à sa manière si particulière, celle de cadenasser la course, empêchant tout favori d’attaquer car n’importe qui sait pertinemment qu’il sera repris par le train ravageur des Sky dont un nouveau membre, futur star sans doute du cyclisme mondial, s’est montré. Le colombien Egan Bernal, dans son aptitude en fin de Tour à porter Chris Froome, s’est révélé aux yeux du grand public et il est certain qu’il sera l’un des énièmes espoirs qu’a compté la Colombie dans sa quête de remporter un jour le Tour.
Cela fait bien longtemps que Nairo Quintana n’est plus un espoir du cyclisme colombien. Il avait la motivation sur cette 105ème édition mais sans doute pas les jambes. La Movistar aura tenté avec Valverde, Quintana et Landa, de loin parfois, en vain, le mieux classé au général reste Landa, seulement septième. Avec son trident, l’équipe espagnol comptait peut-être plus peser sur la course, plus qu’une simple victoire d’étape, mais elle ne pensait pas que ses leaders seraient courts physiquement pour suivre des grimpeurs-rouleurs surpuissants. Ce sont eux qui ont fait la loi tout au long des 21 étapes de cette Grande Boucle. Avec Geraint Thomas et Chris Froome, Tom Dumoulin et Primoz Roglic font partie de cette catégorie. Les deux coureurs ont tenté de bousculer la hiérarchie dominée par les Sky, sans succès. Le néerlandais finit deuxième du Tour après avoir fini deuxième du Giro, une sacré régularité, non payée par un succès au classement général mais bonifiée par une victoire sur le seul contre-la-montre individuel de ce 105ème Tour de France. Le slovène, également vainqueur d’une étape, n’a pas bénéficié de la même puissance que l’équipe Sky mais il s’est montré parmi les plus frais en troisième semaine, de bon augure pour la suite même s’il a déjà 28 ans. Il pourra longtemps se demander pourquoi son coéquipier Steven Kruijswijk a roulé au sommet du Soulor, ramenant Froome dans son sillage. Passé à côté de son chrono, il échoue au pied du podium juste devant…Kruijswijk, qui n’a pas joué la carte collective. C’est tout de même un Tour plus que réussi pour la Lotto NL-Jumbo avec également les deux victoires de Groenewegen.
Côté français, on ne peut pas occulter l’omniprésence de Julian Alaphilippe, vainqueur de deux étapes et du maillot à pois rouges, lui qui est passé en tête de quatre sommets HC, une performance inédite pour un vainqueur du classement du meilleur grimpeur. Très offensif, il a pesé sur la course en s’échappant d’innombrables fois. Romain Bardet, plus discret, n’a pas enchaîné un troisième podium consécutif ni un quatrième Tour d’affilée avec un bouquet. Néanmoins, le leader d’AG2R-la-Mondiale finit à une honorable sixième place et son coéquipier Pierre Latour remporte le classement du meilleur jeune avec une 13ème place au général. Souvent esseulé, Bardet aurait forcément aimé se montrer plus mais il a dû faire face à l’abandon prématuré en première semaine d’Axel Domont et Alexis Vuillermoz.
Classement général :
- Geraint Thomas (GAL), Team Sky, 83h 17min 13s
- Tom Dumoulin (HOL), Team Sunweb, + 1min 51s
- Christopher Froome (GBR), Team Sky, + 2min 24s
- Primoz Roglic (SLV), Lotto NL-Jumbo, + 3min 22s
- Steven Kruijswijk (HOL), Lotto NL-Jumbo, + 6min 8s
- Romain Bardet (FRA), AG2R-la-Mondiale, + 6min 57s
- Mikel Landa (ESP), Movistar, + 7min 37s
- Daniel Martin (IRL), UAE Emirates, + 9min 5s
- Ilnur Zakarin (RUS), Katusha-Alpecin, + 12min 37s
- Nairo Quintana (COL), Movistar, +14min 18s
Maillot jaune : Geraint Thomas (GAL), Team Sky
Maillot vert : Peter Sagan (SLQ), Bora-Hansgrohe
Maillot à pois rouges : Julian Alaphilippe (FRA), Etixx-Quick Step
Maillot blanc : Pierre Latour (FRA), AG2R-la-Mondiale
Meilleure équipe : Movistar (ESP)
Super-combatif : Daniel Martin (IRL), UAE Emirates
Crédits photo à la une: Roxanne King