Sixième de l’Amstel, deuxième de la Flèche Wallonne, vainqueur du Tour de Californie et sixième du dernier Dauphiné Libéré. Voici le début de saison canon du français Julian Alaphilippe. Des classiques, des courses d’une semaine, le français semble taillé pour briller sur tous les terrains. Mais à courir plusieurs lièvres à la fois, le français de 24 ans ne risque t’il pas de passer à côté de certains monuments du cyclisme qui semblent à sa portée ? Doit-il se spécialiser dans un type de courses ou peut-il avoir l’ambition de prendre le départ de toutes les courses pour les gagner, à l’instar d’un Alejandro Valverde. Éléments de réponse, à un peu plus d’une semaine du départ du 103ème Tour de France, qui sera son premier Grand Tour.
Les classiques
Printemps 2015, c’est grâce aux classiques et au triptyque des Ardennaises que l’immense talent de Julian Alaphilippe va exploser aux yeux des spécialistes du cyclisme mondial. En une semaine, ce petit français qui sortait de nulle part ou presque va étonner et détonner : 7ème de l’Amstel pour commencer, mais surtout 2ème de la Flèche Wallonne et de Liège-Bastogne-Liège à chaque fois derrière un certain Alejandro Valverde. A partir de cet instant, le coureur français, alors âgé de 22 ans, rentre dans une autre dimension. Son talent précoce fait naitre les plus grands fantasme chez les fans de cyclisme français : et s’il était ce coureur français capable de gagner enfin l’un des monuments du cyclisme (on ne se doutait certes pas qu’Arnaud Démare allait remporter Milan-San Remo quelques mois plus tard), dans une Nation qui cherche désespéramment depuis près de 20 ans et « l’époque Jalabert » un digne représentant de la bannière tricolore ? Sa fin de saison est plus compliquée, avec « seulement » une 8ème place notable à la classique San Sebastian début aout. Fatigué par une 1ere saison éprouvante en World Tour, le natif de Saint-Amand-Montrond dans le Cher se sait attendu au tournant au début de la saison 2016, où il doit confirmer pour ne pas être classé dans la liste interminable des espoirs sans lendemain.
Petit hic, pendant la coupure hivernale on lui détecte une mononucléose qui le met au repos forcé durant quelques semaines. Il ne reprend le chemin de l’entrainement que courant janvier et sa préparation se trouve alors tronquée. Il décide alors de se concentrer sur un objectif : les Ardennaises 2016, celles-là même qui l’avaient révélé un an auparavant. Alors qu’il arrive au départ de l’Amstel sans repère et avec un état de forme incertain, le « chasseur » de classique qu’il est aspiré à devenir se transforme à l’approche des « côtelettes » ardennaises. Résultat : une 6ème place comme entrée en matière à l’arrivée en haut du Cauberg à Maastricht qui lui permet de se rassurer. Quatre jours plus tard, emmené par un fantastique Dan Martin qui se met à la planche pour lui, Julian termine (encore) 2ème de la Flèche en haut du Mur de Huy et de ses 20%, (encore) derrière un intouchable Valverde. Le clan Alaphilippe sourit, le français est bien de retour à son meilleur niveau, malgré une « Doyenne » en demi-teinte à Liège (23ème). S’il semble incarner l’avenir des classiques – et l’on s’en réjouit – certaines lui semblent encore inaccessibles, avec en tête les Flandriennes. L’enchainement Tour des Flandres – Paris Roubaix n’a pas (encore ?) attiré le français qui ne s’est pas frotté aux spécialistes des pavés au cours de ses 2 dernières années. Cependant, son passé de Vététiste pourrait lui valoir une certaine agilité sur le haut du pavé. A suivre donc…
Celles qu’il doit viser:
**** Flèche Wallonne
*** Amstel Gold Race, Liège-Bastogne-Liège, Classica San Sebastian
** Tour de Lombardie
* Milan-San Remo
Les courses à étapes d’une semaine
Le coureur français est né sur les courses à étapes en mai 2015 de l’autre côté de l’Atlantique, à l’occasion du Tour de Californie. Là-bas, le coureur français est face à ses nouvelles responsabilités au lendemain de sa formidable campagne des ardennaises. Et il ne va pas se dégonfler : assurant son nouveau statut, il se présente en leader assumé et assumant de l’Etixx-Quick Step. Résultat, une 1ère grande victoire chez les pros, et pas n’importe où : au sommet du Mount Baldy Ski Lift lors de l’étape reine, au nez et à la barbe des grimpeurs comme le néerlandais Robert Gesink ou le colombien Sergio Henao. S’il ne remporte pas le classement final – finalement battu de 3 petites secondes au jeu des bonifs’ par ce diable de Peter Sagan – le français étonne encore par sa facilité de récupération sur une course de 8 jours. Le voici entré dans la cour des coureurs de courses à étapes. Si sa deuxième partie de saison n’a pas permis de vérifier cette tendance, la saison 2016 va quant à elle être celle de la confirmation. Suffisamment remis de sa mononucléose à partir du mois de mars, il se concentre tout d’abord avec succès sur la campagne de classiques avant de faire son retour sur une course à étapes lors de ce même Tour de Californie version 2016 avec l’ambition de faire au moins aussi bien qu’en 2015.
Mission accomplie pour le coureur français, qui comme un an auparavant s’impose en solitaire au sommet de l’étape reine à Santa Barbara. Mais cette fois Alaphilippe tient bon jusqu’au bout et remporte le classement final de l’épreuve américaine, démontrant tous ses progrès dans sa gestion de la course et ses capacités à assumer un statut de leader sur une course à étapes (5 jours avec le maillot jaune). Fort de ce succès, il se présente en épouvantail au départ du Critérium du Dauphiné Libéré, impatient de se frotter à un plateau des plus relever avec face à lui Froome, Contador Porte, Aru, Pinot ou Bardet. Et le moins que l’on puisse dire c’est que pendant les 7 jours de la course organisée par A.S.O, les spectateurs vont voir du Alaphilippe partout ! 5ème du prologue (en côte), 4ème de la 3ème étape (vallonnée), 2ème de la 4ème étape (plate), 10ème de la 5ème (arrivée au sommet) , 9ème de la 6ème (montagne) et 6ème de la dernière (vallonnée) : un vrai show tout terrain, made in Alaphilippe avec en prime le maillot blanc du meilleur jeune et une seconde place au maillot vert ! Avec une telle concurrence, le jeune français a montré qu’il avait le talent et la caisse pour tenir tête aux meilleurs, même dans la haute montagne. Lui même se dit « surpris » d’évoluer à un tel niveau et reconnait à demi-mot ne pas connaitre encore réellement quelles sont ses limites. Rendez-vous est pris au prochain niveau : les courses de 3 semaines.
Celles qu’il doit viser:
**** Paris-Nice, Tour du Pays Basque
*** Tirreno-Adriatico, Tour de Catalogne
** Dauphiné Libéré, Tour de Suisse
* Tour de Romandie
Les grands tours
Le français sera bel et bien au départ de son premier grand tour dans un peu plus d’une semaine, et ça, c’est franchement une bonne nouvelle. Si les dirigeants de son équipe Etixx-Quick Step ont essayé de garder le suspense le plus longtemps possible, l’évidence les a poussé a l’annoncer il y a quelques jours déjà. Pour protéger leur poulain et ne pas lui mettre trop de pression, l’objectif annoncé de Julian sur le Tour et justement de le découvrir, avec la pression et l’attente du public/presse française, engendrée par son nouveau statut de cador du peloton. Si tout se goupille bien, on pourrait très vite reparler du coureur français et ce dès la première semaine de la Grande Boucle où quelques étapes semblent taillées pour son profil de « puncheur-sprinteur », désormais aussi à l’aise en haute montagne. Pour le reste et de possibles ambitions au classement général il est encore trop tôt pour les envisager au vu du plateau 2016 (Froome, Quintana, Contador, Nibali, Aru, Van Garderen, Porte, Pinot, Bardet, etc). D’ailleurs, ses dirigeants comptent avant tout sur l’irlandais Dan Martin pour porter haut les couleurs du sponsors belge au général. A moins que la « hype » Alaphilippe submerge la France de Juillet et emporte tout sur son passage. En outre, s’il arrive à s’accrocher en montagne et au vu de la relative faible concurrence des coureurs de moins de 25 ans, il pourrait ramener le maillot blanc sur les Champs-Élysées à Paris voire se positionner en tant que candidat crédible au maillot vert grâce à sa régularité « tout terrain » et si Sir Peter Sagan lui laisse quelques miettes, trop occupé à sa préparation pour l’épreuve de VTT des JO… Réponse dans un peu moins d’un mois…
Ce qu’il peut viser (à moyen terme, sous conditions) :
**** Victoires d’étapes
*** Maillot blanc
** Maillot vert
* Top 10 au classement général
Photo à la une: Getty Images