Thibaut Pinot s’est adjugé la « classique des feuilles mortes », le dernier des cinq monuments de la saison cycliste. Trois jours après avoir remporté Milan-Turin, le coureur de la Groupama-FDJ devient le digne successeur de Laurent Jalabert, dernier français à avoir triomphé aux abords du lac de Côme en 1997.
Une ultime attaque du franc-comtois, lâchant Vicenzo Nibali, est venue couronner un travail de sape entamé dès les premières pentes du Civiglio. Un Tour de Lombardie au scénario singulier a vu le choc des générations tourner à l’avantage du français. Le tout dans un cadre idyllique que l’automne avait magistralement embelli.
Le champion du monde n’a pas tenu
Premier constat, Alejandro Valverde a failli. Garni de son maillot arc-en-ciel, le tout récent champion du monde avait déjà était en difficulté lorsque Vicenzo Nibali, suivi de Thibaut Pinot, avait accéléré le rythme sur les pentes sévères et impitoyables de Sormano. Le Murcien aura subit la course du début jusqu’à la fin perdant totalement pied dans le Civiglio alors qu’il faisait l’élastique dans le groupe des poursuivants.
Un Tour de Lombardie à rebondissements
Tout avait pourtant débuté sans anicroches. Depuis le départ de Bergame, un groupe de huit coureurs s’était détaché avec, en son sein, Florian Sénéchal de la Quick-Step Floors et Marco Marcato de la Team UAE Emirates notamment. La course avait suivi son petit bonhomme de chemin jusqu’aux premières difficultés de la journée. Tout a explosé dans le Mur du Sormano (5.2km à 6.6% et 1.92km à 15.8%, 25/27% max) situé à environ 47km de l’arrivée. L’équipe Lotto NL-Jumbo, emmenée par le vétéran Robert Gesink, préparait le terrain pour son leader slovène, Primoz Roglic. Ce dernier fut la petite étincelle qui mit le feu à la poudrière. Vicenzo Nibali prend alors ses responsabilités et se lança à la poursuite du quatrième du dernier Tour de France. Thibaut Pinot s’employa pour le suivre et bascula avec l’Italien en tête au sommet du « monstre ».
Le peloton comptait déjà des hommes en difficulté. Et parmi eux, Romain Bardet. Le vice-champion du monde passera toute la montée en queue de peloton, accompagné par David Gaudu. Il sera même obligé de mettre le pied à terre après avoir été accroché par un photographe. Sale journée donc pour le Français présenté comme un outsider de l’épreuve. Il ralliera tout de même la ligne d’arrivée. La descente du Sormano entreprise à toute vitesse par les deux hommes de tête est réputée pour être technique mais surtout dangereuse. Néanmoins, cette année elle n’a provoqué la chute d’aucun coureur même si Nibali, pourtant excellent descendeur, a manqué plusieurs fois de filer à la faute. Seul fait à signaler, la crevaison de Gianni Moscon, l’obligeant à abandonner toute velléité de victoire.
Le Civiglio: tournant du Lombardia
Qui aurait pu répondre aux attaques à répétions de Thibault Pinot dans l’ultime grosse difficulté de la course ? Personne. Pas même Vicenzo Nibali que l’on voyait pourtant résister vaillamment pour espérer pouvoir se payer le Français dans la descente comme l’année précédente. Après s’être débarrassé d’Egan Bernal et de Primoz Roglic, Thibault Pinot s’est chargé du cas de l’italien. Il le poussa à la défaillance totale et s’envola pour ne jamais être rejoint. Derrière, les jambes parlèrent et donnèrent raison à Dylan Teuns. Le Belge régla au sprint un petit groupe de cinq coureurs. Le dernier belge à avoir remporté Il Giro di Lombardia n’est autre que Philippe Gilbert en 2010.
« Je suis dans la meilleure forme de ma carrière », se targuait Thibaut Pinot après son passage sur la ligne d’arrivée à Côme. Et on veut bien le croire. Double vainqueur d’étape sur la Vuelta et 6e du général en son terme, 9e du mondial à Innsbruck après avoir abattu un travail magistral et enfin vainqueur de Milan-Turin il y a trois jours, ce dernier sacre vient couronner une saison magnifique et l’installer dans la légende du cyclisme français.
Crédits photo à la Une: Élise Chauveau