En interdisant la position « Mohoric » et la position contre-la-montre en course, l’UCI s’est aventurée sur un terrain très glissant. Loin d’avoir tout le peloton contre elle, l’Union cycliste internationale l’a divisé. Peu importe, le 1er avril prochain, l’utilisation de ces deux positions sera sanctionnée. Analyse.
L’UCI entend bannir la position « Mohoric »
Lorsqu’il a décidé de s’asseoir sur son cadre pour la première fois en 2013, le coureur slovène Matej Mohoric est entré dans l’histoire du cyclisme en donnant son nom à cette position comme un footballeur peut donner son nom à un geste. Il souhaitait surtout améliorer sa performance en descente, obtenant un gain de secondes grâce à l’aérodynamisme amélioré de cette nouvelle position.
En 2016, le spectacle qu’en a offert Christopher Froome dans sa descente fulgurante vers Bagnères-de-Luchon lors de la 8e étape du Tour de France a permis la popularité de cette façon de descendre qui explosait désormais aux yeux du grand public. Ce coup de force du Britannique a à la fois assuré la célébrité et la postérité de la position « Mohoric » mais a également causé sa perte. Les critiques n’ont pas hésité à tomber pour qualifier cette pratique de dangereuse, un danger moins présent chez des coureurs professionnels mais qui, dans l’esprit d’un jeune voulant copier les exploits de ses idoles, pourrait s’avérer dramatique. C’est ainsi que le 8 février, l’UCI a décidé de l’interdire.
L’UCI entend différencier les courses en ligne des contre-la-montre
Pour la position des avant-bras sur le guidon, celle utilisée en contre-la-montre à l’aide de repose-coudes et de prolongateurs, la surprise fut réelle. On ne saurait réellement dater l’arrivée de cette pratique dans les pelotons professionnels tant elle est répandue. Tim Wellens l’avait récemment utilisée lors de la troisième étape de l’Etoile de Bessèges où il s’était imposé après un beau raid solitaire dans le final.
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Seul, cette position contre-la-montre ne pose pas de réel danger. Cependant, l’UCI a considéré que, pour un coureur en faisant l’usage en tête de peloton, notamment lors du contrôle des échappées, la situation était différente et pourrait causer une grave chute si le cycliste en question perdait le contrôle de sa machine. Elle a donc également été interdite.
Un peloton plus que jamais divisé sur ces réformes réglementaires de l’UCI
Si l’on aurait pu croire que les coureurs allaient unanimement rejeté ces nouveaux points de règlement leur disant comment faire du vélo, cela n’a pas été le cas. Bien au contraire. Michal Kwiatkowski (Ineos-Grenadiers), brillant descendeur comme il avait pu le montrer lors des championnats du monde 2014 à Ponferrada, a ironisé dans un tweet, déclarant que l’UCI empêcherait bientôt les coureurs de lever les bras pour célébrer une victoire.
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Ses coéquipiers Egan Bernal et Thomas Pidcock, récent quatrième des championnats du monde de cyclo-cross à Ostende, ont regretté ces décisions, ce dernier la qualifiant même de « ridicule« . Le Français Julien Bernard (Trek-Segafredo) a opté pour l’humour sur Twitter en se demandant si les coureurs pouvaient encore se mettre en danseuse ou prendre un bidon.
Quelqu’un sait si on peut encore se mettre en danseuse ? Ou si on peut lâcher une main pour prendre un bidon ? 😆 https://t.co/lOQ459a2og
— Julien Bernard (@JulienBernard17) February 8, 2021
D’un autre côté, des voix se sont levées pour féliciter cette décision. Parmi les plus célèbres, celles de Dan Martin (Israel Start-Up Nation), se réjouissant de la proactivité de l’UCI qui n’attend pas qu’un grave accident survienne pour agir, et Pierre Rolland (B&B Hotels p/b KTM) qui a déclaré à France tv sport que cette décision n’était « pas une mauvaise chose » et qu’il n’utilisait la position « Mohoric » que « rarement » en course parce qu’il la trouvait « dangereuse« .
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Ces nouveaux points de règlement entreront en vigueur le 1er avril prochain. Sur les courses par étapes, la sanction ira jusqu’à l’amende et une pénalité de temps. Sur les courses d’un jour, la disqualification pure et simple pourra être prononcée. Même si ces décisions de l’UCI sont entérinées, quelque chose laisse à penser que l’on risque d’en entendre encore parler lorsqu’un coureur perdra un Monument pour s’être assis sur son tube.