Il s’agissait de la première grande explication entre favoris. On le savait, le passage dans les Pyrénées du peloton ce week-end allait rebattre certaines cartes, et cela n’a pas manqué. Si la défaillance de Julian Alaphilippe, quoique plus attendue et semble-t-il stratégique, nous a fait mal au coeur, celle de Thibaut Pinot dans l’escalade du premier col hors catégorie de cette Grande Boucle nous l’a déchiré. Visiblement gêné dans le bas du dos et victime d’une terrible défaillance physique dans la montée du Port de Balès, le Franc-Comtois n’a pas pu s’accrocher au train des favoris, lui concédant quasiment 20 minutes sur la ligne d’arrivée. Les rêves de victoire du Français sur les Champs-Élysées s’envolent encore…
Un état de forme finalement aux antipodes de celui de l’année dernière
Le contraste est saisissant. Alors que Thibaut Pinot avait marqué son arrivée dans les Pyrénées par une victoire mémorable au sommet du Tourmalet l’année dernière, lui ouvrant en grand les rêves d’une victoire finale, certes déchue, l’histoire ne s’est pas répétée cette année. Le Franc-Comtois n’avait tout simplement pas les jambes ce samedi pour rivaliser avec un peloton emmené à grand train par la Team Jumbo-Visma. Le travail de destruction massive de Wout Van Aert, décidément partout dans cette édition (déjà deux victoires d’étape en plaine), dans la montée du Port de Balès a très largement décimé le peloton. Hors du coup, Thibaut Pinot ne pouvait y échapper. Seul l’avenir pourra nous dire si cette défaillance était le fruit d’une mauvaise journée, des cicatrices encore présentes de sa chute à Nice lors de la première étape, ou bien d’une méforme plus globale.
Il n’en reste pas moins que la déception provoquée par cette contre-performance est à la hauteur des attentes qui se sont sacralisées autour du coureur Français avant et depuis le départ de la course. Après son abandon l’an passé, alors qu’il semblait dans la forme de sa vie et en mesure de rivaliser avec Egan Bernal pour le maillot jaune, cette nouvelle mésaventure sur le Tour est peut-être celle de trop. La pression était forte autour de Thibaut Pinot et il n’est jamais facile de faire avec dans une course aussi longue et incertaine. Alors que le Français affirmait après la ligne d’arrivée que ce nouvel échec marquerait « un tournant dans sa carrière« , force est de constater que la relation compliquée qu’il entretient avec la Grande Boucle s’épaissit et que le facteur psychologique n’est pas tout à fait à exclure.
Thibaut Pinot aura d’autres cartes à abattre désormais
Si sa gêne au niveau du bas du dos, entr’aperçue sur de nombreux plans au cours de cette étape, ne devrait pas l’empêcher de continuer la course selon ses propres dires, Thibaut Pinot devra ravaler sa déception et se réinventer. Les voies de secours ne sont pas nombreuses. Distancé au général (30e, à 19 minutes du maillot jaune) le Français devrait disposer de « bons de sortie » dans les prochaines étapes de montagne. Contraint de ne pas jouer la gagne finale, Thibaut Pinot pourra tout de même jouer la gagne sur les prochaines étapes de montagne. Un bel objectif pour lui et son équipe après une telle désillusion. Autre option, le Franc-Comtois pourrait également profiter de sa nouvelle relative liberté pour essayer de remporter le classement de la montagne. Revêtir le maillot à pois sur les Champs-Élysées serait une très belle consolation pour le Français. Il s’agirait également de poursuivre la belle série française en la matière, Julian Alaphilippe l’ayant « amené au bout » en 2018 et Romain Bardet l’année dernière.
Pendant ce temps, d’autres « Frenchies » s’accaparent le devant de la scène
Malgré les déboires de Pinot et Alaphilippe, n’oublions pas que la course des Français sur ce Tour ne se limite pas à ces deux noms. Vainqueur à Nice, Julian Alaphilippe a trouvé un digne successeur sur ce Tour. Le deuxième vainqueur d’étape tricolore cette année s’appelle Nans Peters. Pour sa première participation, le coureur d’AG2R La Mondiale a réalisé un magnifique coup en s’imposant à Loudenvielle. Une belle performance qui permet de pouvoir tourner la page Pinot le coeur plus léger. D’autant plus que tout n’est pas perdu dans la course au général. Si Primoz Roglic semble plus que jamais favori de par sa facilité et de par l’état de forme de ses lieutenants de luxe Wout Van Aert et Tom Dumoulin, deux Français n’en trustent pas moins les quatre premières places du général. Derrière Adam Yates et Primoz Roglic, figurent ainsi le bluffant Guillaume Martin et le plus aguerri Romain Bardet. Si le premier n’est à vrai dire pas connu du grand public, Romain Bardet a déjà connu quelques moments de gloire sur la Grande Boucle. Deuxième du général en 2016, troisième en 2017 et maillot à pois la saison passée, le natif de Brioude rassure de par son état de forme et de par sa résilience en cette première semaine de course. A l’attaque dans les derniers hectomètres de course pour essayer de gagner du terrain sur le maillot jaune Adam Yates (il ne compte plus que 11 secondes de retard après cette étape), Bardet pourrait rapidement repasser à l’attaque pour s’emparer de la précieuse tunique. Un état de forme suffisant pour contrecarrer l’inéluctable ascension vers le maillot jaune de Primoz Roglic ?
Crédits photo à la Une: Élise Chauveau